« Nous devons remettre du sens, de l’humain et du soin dans notre système » : Pierre Dharréville, député (GDR) des Bouches-du-Rhône

Pierre Dharréville, député GDR des Bouches-du-Rhône. ©France Keyser

De la présidentielle aux législatives, les élections sont l’occasion d’interroger nos politiques publiques. Quel système de santé pour demain ? Nous avons posé la question à Pierre Dharréville, député (GDR) des Bouches-du-Rhône, membre de la commission des affaires sociales.

Y a-t-il urgence à repenser notre système de santé ?

Pierre Dharréville : Oui. Déjà en crise avant la crise sanitaire, l’hôpital public fait face à de grandes difficultés. Il est urgent d’investir dans les infrastructures et de recruter massivement. Ce qui a été fait jusqu’ici est très insuffisant. La première chose que demandent les soignants, c’est d’avoir plus de collègues. Cela demande des moyens financiers.

Dans ma circonscription comme ailleurs, je vois des femmes et des hommes qui vont au bout d’eux-mêmes pour accomplir leur mission. Les choix politiques qui ont été faits ne sont pas à la hauteur. Dans le même temps, la diversification médicale s’étend. Là encore, un grand plan de formation et de recrutement est nécessaire. Lever le numerus clausus ne fait pas tout. En matière de santé, l’urgence est aussi souvent de prévoir. Nous devons remettre du sens, de l’humain et du soin dans notre système.

Quels sont, selon vous, les chantiers à mener ces cinq prochaines années ?

P. D. : Une partie de la population renonce régulièrement à se soigner, faute de prise en charge. Le recul des remboursements impacte directement les plus fragiles. Nous avons besoin d’un niveau de protection sociale élevé, ce qui demande de gros efforts. Il faut arrêter d’assécher les finances de la Sécurité sociale à coups d’exonérations massives. 

L’état psychique des Français doit également faire partie des préoccupations majeures. Tout comme la santé au travail. J’avais, par exemple, proposé la mise en place d’un cadastre afin de débusquer les maladies éliminables. Quant à la question de l’autonomie, on nous a promis une loi pendant cinq ans, en vain. Les dernières révélations sur les Ehpad ont engendré des travaux, il faut maintenant passer à l’action.

Dans ma région, on compte 50 % d’Ehpad privés à but lucratif. C’est considérable. Moi, je crois au service public, garant de l’égalité. Lutter contre la marchandisation de la santé est le seul moyen de garantir l’accès aux soins pour tous.

Pourtant, la santé peine à peser dans le débat public, y compris en période électorale…

P. D. : Si la pandémie a révélé des dysfonctionnements majeurs, certains pensent peut-être que nous avons fait le tour de la question. Je crois que c’est une erreur. Les mesures qui ont été prises ne sont qu’à caractère immédiat. Parler de santé et de prévention demande de questionner la manière dont nous vivons, travaillons, nous déplaçons. Tout ne se fera pas d’un coup de baguette magique, mais cela appelle une construction politique.

Si elle doit rester une prérogative régalienne, la santé n’est pas une politique qui nous tombe dessus. C’est une politique dans laquelle on doit être partie prenante. Cette démocratie sanitaire, nécessaire à l’implication de chacun, n’existe plus que de manière marginale. La santé est une question sociale, et c’est plus largement la question sociale que l’on peine à mettre au centre du débat.  

Propos recueillis par Laureen Borghese