Santé mentale : comment aider les ados en souffrance ?

« Ils doivent abandonner leur enfance et forger par eux-mêmes, au prix d’expériences parfois douloureuses, leur personnalité d’adulte », écrivait Françoise Dolto, dans son ouvrage “La Cause des adolescents”. ©Getty Images/ Istockphoto

Aujourd’hui, en plus du chamboulement que représente cette période si particulière de la vie, les adolescents de 2023 se heurtent aux bouleversements de notre société : crise sanitaire, dérèglement climatique, guerre en Ukraine et au Proche-Orient… En mars dernier, le rapport du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA) alertait sur leur mal-être et sur la hausse de la prescription de psychotropes chez les enfants de 6 ans à 17 ans. Il pointait la baisse du nombre de pédiatres et de pédopsychiatres et déplorait également la situation des services hospitaliers, obligés de fermer, faute de personnels. La santé mentale des adolescents est un enjeu de santé publique et les réponses politiques ne sont pas toujours à la hauteur. Pourtant, des solutions existent. Et nous pouvons compter sur la motivation et l’implication de professionnels, d’associations et de jeunes pour faire bouger les lignes et relever le défi.


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Pédopsychiatrie en France, une situation préoccupante

Les prescriptions d’antidépresseurs chez les enfants de 6 à 17 ans ont augmenté de 62,6 % entre 2014 et 2021, selon un rapport du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. ©123RF

Structures d’accueil débordées, moins d’offres de soins psychiatriques et davantage de jeunes patients en attente de prise en charge… La Cour des comptes dresse un tableau alarmant de la pédopsychiatrie en France.

La crise sanitaire a pesé lourd sur le moral des enfants et des adolescents. « Néanmoins, leur mal-être est un phénomène durable, nourri par un contexte économique et sociétal incertain et un secteur de la pédopsychiatrie au bout du rouleau. » La professeure Marie-Rose Moro, directrice de la Maison de Solenn, structure parisienne de pédopsychiatrie qui se consacre au mal-être des adolescents, ne mâche pas ses mots.

Parmi les écoliers de 6 ans à 11 ans, 13 % présentent au moins un trouble probable de santé mentale.

« Le Covid, à lui seul, n’explique pas tout », résume-t-elle. A cette pandémie s’ajoutent aujourd’hui une société de plus en plus compétitive où l’on doit choisir très tôt un avenir (par le biais de la fameuse plateforme Parcoursup), des écrans et réseaux sociaux omniprésents, la crainte d’une crise climatique (pour 79 % des jeunes, c’est une préoccupation majeure), les diktats de la réussite et de l’apparence physique, le harcèlement scolaire… Près d’un adolescent sur six est concerné par un trouble psychique ou psychiatrique dans notre pays. Les enfants ne sont pas épargnés : parmi les écoliers de 6 ans à 11 ans, 13 % présentent au moins un trouble probable de santé mentale (tels que troubles anxieux, du sommeil ou de la concentration…), d’après l’étude Enabee de Santé publique France.

Appauvrissement de l’offre pédiatrique

Face à ces maux, il est plus que nécessaire de consulter au plus vite, mais c’est là le cœur du problème. Car, si d’un côté nous constatons une augmentation de la demande de soins, nous faisons face, de l’autre, à un fort appauvrissement de l’offre, avec pour conséquence un déficit de prise en charge des enfants et des adolescents.

Le nombre de pédopsychiatres a effectivement diminué de 34,5 % entre 2010 et 2022.

En effet, sur 1,6 million de jeunes souffrant de problèmes psychiques, entre 750 000 et 850 000, seulement, sont pris en charge en pédopsychiatrie, alerte la Cour des comptes dans son dernier rapport. Pour sa part, le Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA), fait état d’« une offre pédiatrique et pédopsychiatrique en recul, qui ne permet plus d’accueillir dans des délais raisonnables ni d’accompagner au mieux les jeunes qui en ont besoin ».

Le nombre de pédopsychiatres a effectivement diminué de 34,5 % entre 2010 et 2022. La plupart des consultations en centre médico-psychologique sont saturées (il faut en moyenne entre six et dix-huit mois pour obtenir un rendez-vous). Sans parler de la situation de la médecine scolaire, de la protection maternelle et infantile (PMI) et de l’ensemble des acteurs du champ médico-social, très altéré, qui ne permet plus d’assurer les missions de service public d’accueil et de suivi de l’ensemble des enfants et de leurs familles.

Médicaments, faute de mieux ?

Pour répondre au malaise des jeunes, le recours aux psychotropes, en première intention, est de plus en plus fréquent, y compris pour des enfants très jeunes. Le HCEFA note une augmentation de 62,6 % des prescription d’antidépresseurs chez les 6-17 ans entre 2014 et 2021, et de 155,5 % pour les hypnotiques et les sédatifs. Un niveau de consommation nettement plus élevé que la moyenne européenne.

« Il est nécessaire de les prescrire lorsque la balance bénéfice/risque penche en faveur du bénéfice. Et c’est le cas quand un jeune souffre d’une dépression grave »

Docteur Olivier Bonnot, pédopsychiatre et chef de service au CHU de Nantes

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