Les plus précaires victimes de discriminations

Docteur prenant la tension à une patiente
Encore trop de discriminations vis-à-vis des détenteurs de l'AME. 123RF©

Les bénéficiaires de l’aide médicale d’état (AME), font l’objet de discriminations dans l’accès aux soins, d’après une enquête du Défenseur des droits et du ministère de la Santé.

Cette vaste enquête de « testing téléphonique », a mis en lumière des « refus de soins caractérisés » pour les bénéficiaires de l’Aide médicale d’État (AME, dispositif permettant aux étrangers en situation irrégulière sur le territoire français d’être soignés) et, de manière beaucoup plus marginale, à ceux qui bénéficient de la complémentaire santé solidaire (CSS).  

Généraliste, ophtalmologiste, pédiatre…

Les bénéficiaires de l’AME – hommes ou femmes – ont entre « 14 % et 36 % de chances en moins » d’obtenir un rendez-vous chez un généraliste (par rapport aux patients de référence).

L’étude montre qu’ils ont également entre « 19 % et 37 % de chances en moins » pour avoir un rendez-vous chez un ophtalmologue et entre « 5 % et 27 % » chez un pédiatre. La probabilité d’obtenir un rendez-vous pour les bénéficiaires de l’AME est de 10 à 12 points de pourcentage plus faible que celle de la patientèle de référence. 

Pour la complémentaire santé solidaire (CSS) qui a remplacé les dispositifs de couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C) et d’aide au paiement d’une complémentaire santé (ACS), le refus discriminatoire s’exerce dans 1,5 % des cas   

Défenseur des droits

Ces refus sont le fait d’une minorité de praticiens

L’étude précise que ces refus sont le fait d’une « minorité de praticiens », et ne s’appliquent pas à l’ensemble de la profession médicale. Mais, ils « ont une ampleur non négligeable ». Ils sont « souvent exprimées de manière explicite ». 

Par exemple, « 4 % des demandes de rendez-vous des patients bénéficiaires de l’AME chez un généraliste se soldent par un refus discriminatoire explicite ». C’est aussi le cas de 7 % des appels auprès d’un pédiatre et même de 9 % chez un ophtalmologue. Un bénéficiaire de l’AME doit appeler « 1,3 fois plus de médecins pour obtenir un rendez-vous médical qu’un patient sans aide ».

Vaste enquête de « testing téléphonique » – sous forme de tentatives d’appels pour solliciter un rendez-vous. Réalisée par les équipes de l’Institut des politiques publiques (IPP), du Défenseur des droits (DDD), de la Direction de la Sécurité sociale (DSS) et de la Drees (ministère).

Contexte de l’enquête : entre mars et septembre 2022, dix enquêteurs spécialement formés ont ainsi contacté 3 855 praticiens de trois spécialités de ville (médecine générale, pédiatres et ophtalmologues) – de secteur 1 comme de secteur 2 – pour une demande de rendez-vous. Le motif de consultation correspondait à des « motifs courants » et ne revêtait pas de caractère d’urgence. Les praticiens de l’échantillon ont ainsi fait l’objet de tentatives d’appel par ces patients fictifs selon trois statuts différents : bénéficiaires de l’AME, de la CSS et patients de référence (sans aucune aide). L’idée étant de croiser les résultats et de relever si les praticiens sollicités refusaient spécifiquement de prendre en charge ces patients précaires. Quelque 34 000 appels ont été passés (avec un taux de réponse de 80 %, soit 3 086 praticiens).