Psychotropes : en hausse chez les enfants et les adolescents

Jeune fille triste portant une sweat à capuche jaune
Les jeunes filles sont très touchées par la souffrance psychique 123RF©

La prescription de psychotropes a augmenté en France et concerne « des dizaines de milliers » d’enfants et d’adolescents âgés de 6 à 17 ans, d’après un rapport choc du Haut Conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge (HCFEA).

« Ces niveaux d’augmentation sont sans commune mesure (deux à 20 fois plus élevés) avec ceux observés au niveau de la population générale », alarme le rapport.

Psychotropes en hausse chez les enfants et les ados

Antidépresseurs, antipsychotiques, sédatifs, le rapport publié par le Haut Conseil de la famille de l’enfance et de l’âge (HCFEA), un organisme placé auprès de la Première ministre et chargé de conseiller le gouvernement, tire la sonnette d’alarme sur la hausse de la prescription des psychotropes. Jusqu’alors, ces médicaments pour traiter une dépression, une psychose encore des troubles anxieux, ne concernaient que les adultes. Mais ces pathologies touchent aussi les enfants et les adolescents. Et les chiffres de prescription ont doublé chez les moins de 20 ans, entre 2014 et 2021.

  • + 48 % pour les antipsychotiques
  • + 62 % pour les antidépresseurs
  • et + 78 % pour les psychostimulants  (troubles du déficit de l’attention…)
  • + 155,48 % pour les hypnotiques et sédatifs

Nous pensions qu’en France, on prescrivait traditionnellement peu aux enfants. Mais les chiffres ont doublé, et cela nous place parmi les pays les plus prescripteurs d’Europe.

Sylviane Giampino, présidente du Conseil de l’enfance et de l’adolescence du HCFEA.
La Ritaline, un médicament prescrit contre l’hyperactivité pathologique de certains enfants. ©123RF

Pourquoi ?

Plusieurs explications sont avancées par les professionnels de santé pour expliquer que la souffrance psychique des jeunes, en particulier des jeunes filles, s’est dégradée par rapport aux plus âgés. Les facteurs sociaux et environnementaux ont accentué les effets : crise sanitaire, guerre en Ukraine, éco-anxiété, crises économiques et inégalités sociales… On manque cruellement de pédo-psychiatres, de psychologues, malgré la mise en place du dispositif Mon Psy (mesure phare des Assises de la santé mentale, en 2021). Les consultations en centre médico-psychologique sont saturées (il faut entre 6 et 18 mois pour obtenir un rendez-vous). Les services de pédo-psychiatrie sont en crise.

« La situation de la médecine scolaire, de la PMI et de l’ensemble des acteurs du champ médicosocial est très altérée et ne permet plus d’assurer les missions de service public d’accueil et de suivi de l’ensemble des enfants et des familles », ajoute le HCFEA, pour couronner le tout.

Rapport du Haut conseil de la famille, de l’enfance et de l’âge. DR.

Le HCFEA précise que « les recommandations des autorités de santé en France sont de proposer en première intention des pratiques psychothérapeutiques, un accompagnement psychologique, éducatif et social ». « Les médicaments n’arrivent qu’en dernière instance et en complément. Or il s’avère que des enfants peuvent prendre des psychotropes et ne pas accéder à ces aides complémentaires. Tout le monde nous dit « on ne sait pas où adresser les enfants car tout est saturé ». Pendant ce temps, l’enfant grandit, moins bien, les symptômes s’installent, s’aggravent », déplorent les auteurs du rapport.

Conséquences

« Cette situation engage des effets majeurs documentés d’un point de vue épidémiologique et scientifique », précise le rapport.

  • Déficit de prise en charge des enfants ;
  • aggravation de l’état de santé des enfants ;
  • augmentation des hospitalisations en urgence, des passages à l’acte suicidaire et de suicides chez l’enfant et l’adolescent ;
  • recours, faute de soins adaptés, à la seule prescription de médicaments psychotropes.

Hausse de 23 % des idées suicidaires chez les 18-24 ans et de 58 % chez les 11-17 ans entre 2018 et 2021.

Santé publique France, (février 2022).

Quelle politique et quelles pratiques de soins souhaitons-nous pour nos enfants et les prochaines générations ? Le Haut Conseil recommande de renforcer considérablement les moyens structurels dédiés à la santé mentale de l’enfant et au déploiement d’une politique publique ambitieuse en la matière, ce qui implique de renforcer les moyens de la pédopsychiatrie mais également les moyens dédiés aux approches psychothérapeutiques, éducatives et sociales destinées à l’enfant et à la famille.