Pesticides : des produits reconnus dangereux pour la santé

L’annonce de Gabriel Attal en février de la suspension du plan Ecophyto, visant à réduire de 50 % les usages des pesticides, est un « signal désastreux », selon les ONG de défense de l’environnement. ©123RF

Les pesticides les plus toxiques contiennent des particules de pétrole. Leurs conséquences nocives sur la santé humaine et environnementale sont aujourd’hui largement démontrées par la littérature scientifique.

Tuer. La signification même du suffixe « cide » rappelle l’objectif premier des pesticides. « Il s’agit de produits conçus pour avoir une action biologique sur des organismes, afin de les détruire », explique l’écotoxicologue Eric Vindimian. Destinés en premier lieu à l’agriculture, les pesticides se déclinent en trois grandes catégories : les herbicides, pour éradiquer les herbes indésirables, les insecticides et les fongicides utilisés contre les champignons.

Selon un rapport publié en 2023 par une commission d’enquête de l’Assemblée nationale, la majorité des pesticides (70 %) est dédiée aux grandes cultures (surtout les céréales et oléagineux), puis à la vigne (20 %) et enfin aux autres cultures, principalement les fruits et légumes, (10 %).

Contamination de la terre, de l’eau et de l’air

Mais « quand vous faites mourir une plante ou un insecte en vous attaquant à son fonctionnement physiologique, il y aura forcément des répercussions sur une multitude d’autres organismes autour, et y compris les humains », précise Pierre-Henri Gouyon, biologiste et professeur émérite au Muséum national d’histoire naturelle.

Après leur pulvérisation dans les champs, les molécules vont en effet contaminer la terre, l’eau, l’air, et se retrouver ensuite dans notre alimentation. Dès les années 1960, plusieurs chercheurs commencent à alerter à propos de la nocivité des pesticides, à l’image de la biologiste américaine Rachel Carson avec son ouvrage Printemps silencieux, publié en 1962 et véritable référence dans la dénonciation de ces substances, en particulier du DDT.

Ces molécules s’infiltrent dans nos cellules comme du sable, ce qui les empêche de fonctionner normalement. C’est cet ensablement progressif qui dérègle l’organisme et cause des pathologies chroniques.

Gilles-Eric Séralini, biologiste

« Les pesticides les plus toxiques sont fabriqués à base de pétrole, note le biologiste Gilles-Eric Séralini. Leurs effets sur la santé sont dus aux résidus pétroliers que l’on y trouve. Ces molécules s’infiltrent dans nos cellules comme du sable, ce qui les empêche de fonctionner normalement. C’est cet ensablement progressif qui dérègle l’organisme et cause des pathologies chroniques. »

Leucémies pédiatriques

Aujourd’hui, les répercussions sanitaires sont clairement et abondamment documentées. Dans l’une de ses dernières études parue en 2021, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) « confirme la présomption forte d’un lien entre l’exposition aux pesticides et plusieurs pathologies parmi lesquelles le cancer de la prostate, la maladie de Parkinson, les troubles cognitifs… »

Plus il y a de vignes autour du domicile, plus le risque de leucémie infantile est élevé. C’est la conclusion majeure d’une étude française publiée en octobre dans “Environmental Health Perspectives” (EHP), la première à quantifier ce lien à l’échelle nationale. ©123RF

Au mois d’octobre 2023, l’Inserm a publié une nouvelle étude ciblée sur les produits utilisés dans les vignes. Les données récoltées mettent en avant un risque accru de cancers et plus précisément de leucémies pédiatriques pour les enfants résidant près de parcelles viticoles.

De l’armement à l’agriculture
A l’origine, les produits phytosanitaires étaient employés dans le cadre de l’armement, sous la forme de gaz toxiques de combat. « Et également comme biocides pour tuer les hommes, à l’instar du Zyklon B utilisé dans les camps de concentration, rappelle le biologiste Gilles-Eric Séralini. Après la guerre, les fabricants ont simplement recyclé les substances qu’ils produisaient pour l’agriculture en les diluant afin qu’elles ne s’attaquent soi-disant plus aux hommes, mais à la faune et à la flore. Ces grandes firmes sont toujours actives et prospères, à l’exemple de Bayer (anciennement IG Farben) et d’Aventis (Rhône-Poulenc). »

Les agriculteurs, premières victimes des pesticides

L’exposition professionnelle aux pesticides est d’ailleurs reconnue par la Sécurité sociale, qui a mis en place un fonds d’indemnisation à destination des victimes. Son dernier rapport d’activité, datant de 2022, indique que les demandes « émanent à 92 % de travailleurs agricoles », des professionnels tout particulièrement exposés à ces produits.

Le toxicologue André Cicolella pointe, quant à lui, l’augmentation, dans le monde, des cancers dits « hormonaux dépendants, comme ceux du sein et de la prostate, qui ne peuvent pas s’expliquer sans l’utilisation massive des perturbateurs endocriniens, dont font partie les pesticides. Etre exposé à ces substances au cours de la grossesse peut entraîner des cancers à l’âge adulte. »

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