Alors que le Sénat vient de voter une proposition de loi sur le sujet des frais d’incidents bancaires, l’Assemblée nationale s’apprête à faire de même ce jeudi 4 juin. Si un million de personnes fragiles ont bénéficié du plafonnement de ces frais, il est impératif de pérenniser et d’élargir ce dispositif, estiment les associations. Au-delà de l’urgence sociale, c’est également le modèle économique de la banque qui fait « payer les pauvres » qu’elles souhaitent voir réformer.
La crise sanitaire et ses répercussions sur l’économie ont impacté le budget des consommateurs. Aux chutes de revenus en raison du chômage, de la mise en activité partielle ou de la suppression des heures supplémentaires s’ajoutent les risques de basculement de nombreux ménages sous l’effet des accidents de la vie (séparations, longues maladies, etc.) Ces événements peuvent déclencher, quand l’épargne éventuelle est consommée, une spirale de frais d’incidents bancaires qui appauvrissent les ménages. Avant la crise, déjà 8 millions de personnes payaient, chaque mois, des frais d’incidents. Combien seront-ils demain ?
Ces frais ont été estimés par l’Unaf et l’Institut national de la consommation à 6,5 milliards d’euros en 2016. Pour les banques, ils sont devenus une source facile de revenus… et de rentabilité. En 2018, l’Ufc-Que Choisir évaluait « la marge moyenne réalisée sur les incidents bancaires à environ 86 % ». Au fil des ans, c’est un système de « solidarité inversée » qui s’est mis en place : les frais d’incidents compensent les marges quasi nulles des prêts immobiliers ou d’autres services bancaires sous-facturés.
Les signataires de cet appel, associations de consommateurs, de lutte contre la pauvreté, de personnes en situation de handicap, syndicats représentant les personnels des établissements bancaires, ne demandent pas une suppression totale des frais mais de les plafonner pour qu’ils ne génèrent pas des difficultés supplémentaires.
Toutefois, les choses avancent. Comme le mentionne l’enquête tarification bancaire 2020 de la Clcv, le Crédit Agricole des Côtes d’Armor, par exemple, plafonne déjà les frais d’incidents à 25 € par mois pour tous les particuliers. Il faut accélérer cette tendance, estiment les associations qui appellent le Gouvernement et le Parlement à profiter du plan de relance ou des propositions de loi déposées au Parlement pour initier ce chantier ambitieux.
Issue de larges consultations, la loi Lagarde avait démontré en 2010 qu’il était possible de réguler le crédit renouvelable, réduire le fléau du surendettement, tout en limitant les impacts pour les acteurs économiques. Tout le monde s’en félicite aujourd’hui. Il pourrait en être de même sur les frais bancaires.
Signataires : Union nationale des associations familiales (Unaf), l’Ufc Que Choisir, la Clcv, l’Association Force Ouvrière Consommateurs (Afoc), la Confédération syndicale des familles (Csf), la Confédération nationale des associations familiales catholiques (Cnafc), Emmaüs France, Secours catholique, Apf France handicap, Fédération banques et assurances de la Cgt.