Budget de la Sécu : «une austérité totale pour la population» [Pascale Vatel, Mutuelles de France]

Pour Pascale Vatel, administratrice des Mutuelles de France : « les coupes du budget de la Sécu sont d’une ampleur inédite, alors que le droit à la santé et l’accès aux soins sont déjà dans une situation alarmante ». © Cyril Entzmann / Divergence
Pour Pascale Vatel, administratrice des Mutuelles de France : « les coupes du budget de la Sécu sont d’une ampleur inédite, alors que le droit à la santé et l’accès aux soins sont déjà dans une situation alarmante ». © Cyril Entzmann / Divergence

Sans surprise, le Premier ministre Michel Barnier a dégainé l’article 49.3 de la Constitution pour faire passer en force un budget de la Sécurité sociale décrié depuis des semaines par l’ensemble des acteurs sociaux pour sa rigueur inédite. Une décision dont les conséquences politiques devraient conduire à la chute de son gouvernement dans les prochains jours. Pour Viva, Pascale Vatel, administratrice de la Fédération des Mutuelles de France chargée de la protection sociale, revient sur le contenu de ce texte et rappelle que son application aurait aggravé les inégalités d’accès aux soins dans notre pays.  

Comment caractériseriez-vous le projet défendu par le gouvernement pour le budget de la Sécurité sociale ?

Pascale Vatel : C’est un budget qui porte gravement atteinte à la solidarité. Les coupes sont d’une ampleur inédite, alors que le droit à la santé et l’accès aux soins sont déjà dans une situation alarmante : renoncements aux soins, déserts médicaux, hôpital public asphyxié, perte d’autonomie non financée… En imposant des coupes de plusieurs milliards pour l’Assurance maladie et pour les retraites, le gouvernement fait le choix d’aggraver la situation.

Quelles seront les conséquences pour les assurés sociaux ?

P.V. : Nos droits reculent et le coût de la santé va encore augmenter. L’an dernier, le remboursement de la Sécurité sociale en dentaire est passé de 70 à 60 %. Le gouvernement, en 2025, veut réduire celui des consultations et des actes des médecins et des sages-femmes. C’est un recul important alors même que les honoraires de ces professionnels ont augmenté. C’est donc aux patients, via leur complémentaire santé, s’ils en ont une, ou directement, s’ils n’en ont pas, comme 3 millions de personnes, de payer la différence. Les mutuelles devront augmenter inévitablement leurs cotisations qui, en plus, sont taxées à plus de 14 %. J’ajoute que ce budget ne résoudra en rien les crises de notre système de santé.

Alors, comment faire autrement  ?

P. V. : Le débat à l’Assemblée nationale a prouvé qu’il y avait un autre chemin. Les députés ont su trouver 20 milliards d’euros de recettes nouvelles en faisant mieux contribuer l’ensemble des richesses. C’est donc qu’il existe des solutions non retenues par le gouvernement. Les dépenses de santé augmentent pour des raisons parfaitement identifiées : vieillissement de la population, accroissement du nombre de malades chroniques, évolution des technologies médicales et des thérapies…

La question qu’il faut se poser, c’est la manière dont nous voulons toutes et tous financer ces dépenses croissantes : ensemble ou chacun pour soi ? Voulons-nous que la santé soit un droit ou dépende de l’épaisseur de notre porte-monnaie ? Pour les Mutuelles de France, ce dont la société française a besoin, c’est d’une Sécurité sociale au plus haut niveau financée à hauteur des nécessités de la population. Avec ce budget de la Sécu, le gouvernement fait l’inverse. C’est pourquoi nous menons l’action « Stop à la casse de la Sécu » et « Stop aux taxes sur la santé ».

Carole Hazé présidente de la FMF

Engagée en mutualité depuis ses études universitaires, Carole Hazé s’est illustrée à la fois au sein de mutuelles et de structures mutualistes consacrées à la prévention et aux actions sociales. A la tête de Solimut Mutuelle de France, la militante succède à Jean-Paul Benoit à la présidence de la Fédération des Mutuelles de France (FMF), qui rassemble 49 groupements mutualistes, protégeant deux millions de personnes. Carole Hazé devient ainsi la première femme à présider une fédération mutualiste.