Androcur : les victimes demandent des comptes à l’Etat

Après les victimes du Mediator et de la Dépakine, c’est au tour de celles de l’Androcur de demander des comptes à l’Etat. ©REA

L’Androcur, ce progestatif prescrit aux femmes présentant une hyperpilosité, se retrouve sur le banc des accusés. Deux requêtes ont été déposées au tribunal administratif de Montreuil (Seine-Saint-Denis). L’Agence du médicament est mise en cause pour avoir tardé à informer correctement les patients du risque de tumeur au cerveau, malgré les alertes.

L’Androcur est un dérivé de la progestérone, qui a pour objectif de bloquer l’activité des hormones mâles. Il est prescrit pour les femmes qui ont une pilosité sévère et aux hommes qui ont eu un cancer de la prostate. Mais pris à long terme et à haute dose, ce produit serait à l’origine de méningiomes, autrement dit de tumeurs au cerveau, chez les femmes. D’autre part, comme le Mediator, l’Androcur a largement été prescrit pour d’autres pathologies comme l’endométriose, l’acné ou comme moyen de contraception. C’est aussi là que le bât blesse.

Les méningiomes sont des tumeurs des membranes qui entourent le cerveau : les méninges.

ANSM

Nouveau scandale sanitaire ?

On connaissait les effets néfastes entraînés par la prise de ce médicament depuis 2008 environ. Mais c’est en 2018 que l’affaire a réellement éclaté, quand cinq patientes sous Androcur et opérées d’un méningiome, avec pour certaines des séquelles importantes, ont décidé d’aller en justice pour obtenir réparation.

« Les méningiomes sont des tumeurs des membranes qui entourent le cerveau : les méninges, explique l’ANSM. Le plus souvent ces tumeurs sont bénignes, mais elles peuvent grossir et comprimer les structures neurologiques, ce qui nécessite un geste chirurgical qui n’est jamais anodin. »

Aujourd’hui, deux nouvelles requêtes ont été déposées au tribunal administratif de Montreuil, en Seine-Saint-Denis, département où est installée l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Sur le banc des accusés : l’ANSM, donc l’Etat, dans ce qui pourrait être, un nouveau scandale sanitaire. D’autres requêtes sont en cours de la part de femmes ayant utilisé de l’Androcur et d’autres progestatifs, le Lutéran et le Lutényl.

Que reproche-t-on à l’ANSM ?

Dans ces plaintes, l’Agence du médicament est clairement pointée du doigt. On lui reproche « un défaut d’information » sur les risques connus du médicament depuis plusieurs années. Car le lien de l’Androcur avec les méningiomes a clairement été établi dans de grandes enquêtes, en 2018.

D’ailleurs, depuis cette date, il est largement moins prescrit, selon l’agence. La responsabilité de l’ANSM, et donc de l’Etat, est clairement mise en avant par les parties civiles qui pointent également la responsabilité des laboratoires dans ce défaut d’information.

Que réclament les parties civiles ?

Elles  demandent « un dispositif d’indemnisation comme cela a été fait pour le Médiator et la Dépakine », deux autres scandales sanitaires.

C’est l’avocat Joseph-Oudin, grand défenseur des victimes de scandales sanitaires comme celui de la Dépakine, et l’association Amavea, regroupant 900 patientes atteintes de méningiomes, qui sont aux côtés des victimes.

Pour l’heure, les médecins sont invités à ne pas prescrire l’Androcur comme contraceptif, contre l’endométriose ou encore pour soigner l’acné. Trois autres produits de la même famille (le Colprone, le Depo Provera et le Surgestone) présenteraient un risque de développer des méningiomes.