« Les cotisations sont prises en étau » : Antoine di Ruzza, trésorier de Solimut Mutuelle de France

Les cotisations mutualistes prises en étau
Antoine di Ruzza, trésorier de Solimut Mutuelle de France. ©DR

Antoine di Ruzza, trésorier de Solimut Mutuelle de France, évoque les transferts de charges successifs vers les mutuelles. Il révèle leur poids sur les cotisations des mutualistes.

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale prévoit de nouveaux transferts de charges sur les complémentaires santé. Quelle est votre réaction ? 

Antoine di Ruzza : Cela fait plusieurs années que le gouvernement se sert dans les finances des mutuelles. Les cotisations de nos adhérents sont devenues des variables d’ajustement du gouvernement pour ses politiques d’accès aux soins. On nous annonce aujourd’hui un nouveau transfert de 300 millions d’euros, en année pleine, de la Sécurité sociale vers les complémentaires santé.

C’est une casse de la solidarité nationale qu’est la Sécurité sociale. Et ce sont les mutualistes qui vont devoir mettre la main au portefeuille pour supporter ce transfert de charges. S’ajoutent à cela les forfaits, les franchises et bien sûr les taxes sur la santé. Aujourd’hui, les taxes ponctionnent plus de 14 % des cotisations de nos adhérents, soit deux mois de cotisations… 

« Les cotisations sont devenues des variables d’ajustement du gouvernement pour ses politiques d’accès aux soins. » 

Le gouvernement s’est aussi basé sur les mutuelles pour financer la réforme dite du « 100 % santé ». Celle que les mutualistes appellent « reste à charge zéro » …

A. d . R . : Effectivement, le Rac 0 est en réalité un transfert de charges puissance mille. Ce dispositif correspond à de réels besoins de santé des populations en matière de soins dentaires dentaires, optiques et d’audition. Sauf que le gouvernement s’est totalement défaussé sur les adhérents mutualistes pour financer ce dispositif.

Cela a eu un impact particulièrement important pour une mutuelle comme Solimut. Elle a toujours développé une politique d’accès aux soins pour tous, dont les publics en difficultés financières. Avec le Rac 0, les prestations ont été multipliées par six dans le domaine de l’audition. Sans avoir en face les cotisations correspondantes. 

Autant vous dire que la conséquence est très lourde sur le résultat économique. Et, comme vous le savez, la mutuelle n’a qu’une seule ressource, les cotisations de ses adhérents pour ses adhérents. Toutes ces dépenses de santé doivent être financées, et nous ne pouvons faire de miracle. Aujourd’hui les taxes et les transferts de charges sur les mutuelles prennent les cotisations en étau.

Quelles sont les solutions pour que le budget de la mutuelle se retrouve à l’équilibre ? 

A. d. R. : Notre mutuelle a fait des efforts importants pour absorber ces différents chocs. Elle n’a pas la main sur les montants des taxes ni sur les dépenses de santé qu’elle doit rembourser. Il ne lui reste donc que la main sur la maîtrise de ses frais, de façon à absorber les conséquences de ces mesures et dans l’objectif d’un retour à l’équilibre. 

Une solution permettrait d’alléger le coût des cotisations pour les adhérents mutualistes : la suppression des taxes sur les cotisations des adhérents. C’est ni plus ni moins qu’une taxe sur la santé des Français. Or, on ne choisit pas d’être malade ou en bonne santé. Rendez-vous compte : avec près de 15 % de taxe, notre santé est trois fois plus taxée qu’un soda ou un hamburger. Plusieurs milliers d’adhérents se sont mobilisés pour demander la suppression de ces taxes à leurs députés. Notamment grâce au site pas-de-taxe-sur-ma-sante.fr que nous avons lancé. Plus nous serons nombreux, plus nous serons entendus. Il est temps que le gouvernement respecte les valeurs du mouvement mutualiste. Un mouvement qui se bat pour un accès à la santé pour tous. 

PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOIS FILLON