Présidentielle : quelle place les candidats accordent-ils à la santé ?

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Les candidats à l’élection présidentielle : de gauche à droite - Yannick Jadot (EELV) - Jean-Luc Mélenchon (France Insoumise) - Christiane Taubira - Fabien Roussel (Parti communiste) - Anne Hidalgo (Parti socialiste) - Valérie Pécresse (Les Républicains). CREDITS PHOTO REA

Accaparée par les sujets identitaires et sécuritaires, la campagne présidentielle peine à s’emparer des thématiques de santé. Pourtant, ces questions arrivent en tête des principales préoccupations des Français, d’après les récents sondages. Pour connaître les préconisations des candidats concernant l’accès aux soins, la rédaction de Viva a épluché leurs programmes…

Dans les récentes enquêtes d’opinion, la santé arrive toujours en tête des préoccupations des Français. Mais le sujet ne trouve pourtant qu’un écho minime dans la campagne. Les discussions identitaires et sécuritaires continuent d’accaparer les médias, les échanges entre les candidats et les meetings. Pour connaître les positions des prétendants à la course élyséenne, la rédaction de Viva à étudié leurs programmes électoraux en évaluant la place que chacun accorde à l’accès aux soins. Et quel système de santé se dessine en creux. Nous avons toutefois choisi d’écarter les propositions de l’extrême droite, celles d’Eric Zemmour et de Marine Le Pen. Car leurs idées se trouvent trop éloignées des valeurs de solidarité, d’entraide et d’humanisme propres à notre ligne éditoriale. 

La santé au cœur des programmes présidentiels

Par ailleurs, ce décryptage n’a aucune prétention d’exhaustivité. Ainsi, à l’heure où nous publions cet article, certaines des personnalités dont nous présentons le programme n’ont toujours pas recueilli les 500 signatures obligatoires pour officialiser leur candidature. Tous les textes sélectionnés accordent toutefois une place prépondérante aux questions de santé. Valérie Pécresse lui dédie ainsi « un plan d’urgence ». Yannick Jadot la place au cœur de sa proposition intitulée « Prendre soin du vivant ». Fabien Roussel et Anne Hidalgo en font également l’un des axes principaux de leur propositions.

Le non-programme du non-candidat Macron

S’il arrive en tête des sondages et qu’il a déjà recueilli plus du double des parrainages nécessaires pour se présenter à l’élection, Emmanuel Macron n’a pourtant toujours pas officialisé sa candidature. La campagne du « non-candidat » a néanmoins bel et bien commencé, avec un site Internet déjà mis en ligne et plus de 500 000 tracts imprimés. Mais aucun programme n’a pour le moment été dévoilé, à moins de 50 jours du premier tour. 

Les problématiques essentielles de santé sont abordées

Crise hospitalière, difficultés d’accès aux soins de premiers recours et déserts médicaux, les principales problématiques pesant sur l’ensemble de la population sont aujourd’hui clairement identifiées. Autant d’indicateurs révélant la dégradation du système de santé, qui s’est accélérée depuis la crise sanitaire. Dans la grande majorité des programmes figurent ces questions essentielles de santé. A l’image du sauvetage de l’hôpital. Sa « reconstruction » est l’une des priorités de Jean-Luc Mélenchon. Le représentant d’Europe Ecologie Les Verts (EELV), Yannick Jadot promet de son côté que le sauvetage de l’hôpital « sera l’un de (ses) chantiers prioritaires ». Pour Anne Hidalgo, il est nécessaire de « consolider le rôle de l’hôpital public comme pilier de la santé des Français ». Valérie Pécresse, Christiane Taubira et Fabien Roussel, revendiquent également cette priorité. 

Le dossier du prochain numéro de Viva porte sur les questions de santé au cœur de la campagne.

Financer la reconstruction de l’hôpital

Mais quelles sont les propositions concrètes de financement ? La candidate des Républicains évoque à ce sujet le lancement d’un « audit en matière d’investissements », sans plus de précisions. La gagnante de la Primaire populaire, Christiane Taubira, ne donne pas plus de détails budgétaires. Du côté du Parti socialiste, Anne Hidalgo propose de transformer le financement de l’hôpital grâce à une dotation de l’Etat. Et de renoncer au principe de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam). A sa place, « les modalités d’évolution et de maîtrise de nos dépenses de santé (seront fondées) sur des Objectifs nationaux de santé publique (ONSP). Et non plus uniquement sur des indicateurs budgétaires ». Le candidat du Parti communiste préconise lui « un budget de fonctionnement couvrant l’ensemble des charges et obligations des établissements. Sur la base de l’obligation de moyens et non de résultats ».

Jean-Luc Mélenchon souhaite quant à lui « instaurer le 100 % Sécu en remboursant la totalité des soins de santé prescrits et en intégrant les mutuelles dans la Sécurité sociale. » A ce sujet, le site Place de la santé, créé par la Mutualité française, prévient que « cette mesure, si elle était mise en place en l’état, occasionnerait un reste à charge pour les Français d’environ 10 milliards d’euros. »

Revoir la tarification à l’acte

Le mode actuel de financement de l’hôpital, basé sur la facturation des activités hospitalières, est pointé du doigt par plusieurs candidats. Yannick Jadot souhaite ainsi encadrer cette tarification (T2A) pour « sortir l’hôpital de la course à la rentabilité ». Pour le candidat EELV, il faudrait que ce système soit désormais réservé aux seuls « actes techniques et programmables ». Anne Hidalgo envisage elle aussi d’en modifier les règles. Et Pour Fabien Roussel, il devrait être totalement supprimé. 

Augmenter le nombre de médecins

Par ailleurs, l’augmentation du nombre de médecins et de personnels soignants est recommandée dans pratiquement tous les programmes. Cette mesure profiterait non seulement aux hôpitaux mais également aux territoires dans lesquels l’offre de soin reste insuffisante. Voire parfois même inexistante… Pour lutter contre ces déserts médicaux, les candidats veulent revoir les grands principes de la formation médicale. La candidate LR envisage ainsi d’augmenter le nombre de médecins formés. Avec comme objectif d’atteindre 20 000 professionnels supplémentaires d’ici cinq ans. Sachant qu’il y avait 312 172 médecins inscrits à l’Ordre en 2021. Valérie Pécresse et Anne Hidalgo proposent toutes les deux « une quatrième année » de formation dans un désert médical. Yannick Jadot se penche également sur la formation des médecins en « doublant les capacités d’accueil des universités ». 

Lutter contre les déserts médicaux

Densifier les effectifs passe également par une remise en question du numerus clausus. Jean-Luc Mélenchon demande par exemple de supprimer cette limitation des places pour les étudiants en médecine. Le candidat de La France Insoumise partage cette volonté avec Yannick Jadot et Fabien Roussel. Le candidat PC revendique lui l’arrêt des « quotas officiels ou officieux pour les formations initiales, médicales comme paramédicales ». La question du lieu d’exercice des médecins est également largement posée. « Une refonte des conditions d’installation et d’exercice doit être engagée avec une obligation de résultat », affirme Christiane Taubira. « Dans les zones denses, un médecin ne devra s’installer que si un autre part à la retraite », propose Fabien Roussel. 

La campagne présidentielle ne s’empare toujours pas des sujets de santé

Bon nombre d’autres sujets de santé sont abordés dans les programmes. Des mesures pour les Ehpad, alors que le scandale autour des établissements privés Orpea vient juste d’être révélé, notamment dans les propositions d’Anne Hidalgo, Valérie Pécresse, Fabien Roussel et Jean-Luc Mélenchon. Mais également des suggestions pour encadrer la dépendance et favoriser la prévention. Ainsi que des arguments pour une meilleure prise en compte de l’environnement dans le système de santé, en premier-lieu dans le texte de Yannick Jadot. Autant de démonstrations trop peu (voire pas du tout) débattues, discutées ni examinées par les journalistes… Pourtant, c’est en confrontant les arguments des candidats, en vérifiant la faisabilité de leur projet, qu’un programme peut convaincre ou dissuader les électeurs. Or, à moins de six semaines du premier tour de l’élection présidentielle, la campagne n’a toujours pas réussi à s’emparer des questions de santé. 

La mise en garde de certains sujets abordés dans les programmes apparaît également nécessaire. A l’image des restrictions proposées par Valérie Pécresse au sujet de l’aide médicale d’Etat (AME) accordée aux étrangers en situation irrégulière. La candidate des Républicains souhaite en effet qu’elle soit restreinte aux soins urgents et aux maladies contagieuses, ce qui viendrait directement entraver le droit fondamental à l’accès aux soins… 

Les candidats interrogés sur les questions de santé

La Mutualité Française organise un grand oral des candidats à la présidentielle le 1er mars 2022 au Palais Brongniart, à Paris. Ils seront questionnés sur leurs projets pour la santé et la protection sociale. Les débats sont à suivre en direct et en intégralité sur le site « Place de la santé » et Public Sénat, ainsi que sur BFMTV et RMC info

La Mutualité Française organise un Grand oral des candidats sur les thématiques de santé, le 1er mars prochain.