Une angoisse qui submerge au point de ne plus pouvoir se rendre en classe, c’est ce que l’on nomme le refus scolaire anxieux ou phobie scolaire. Depuis la crise sanitaire et dans un contexte mondial incertain, le nombre de cas a augmenté. Heureusement, des solutions existent pour y faire face.
« Un matin, j’ai dit à ma mère que je n’irai plus au collège. Ce n’est pas que je ne voulais pas, c’est que je ne pouvais plus », confie Léna, 14 ans. Devant cette peur panique d’aller à l’école et la détresse qui envahit la jeune adolescente, ses parents sont démunis.
« Nous avons été désemparés devant l’angoisse de notre fille. Nous n’avons pas mesuré à quel point elle souffrait. » Pourquoi des enfants sans histoires craquent- ils un jour ? Comment leur entourage peut-il leur venir en aide ?
Mal au ventre, à la tête…
« La phobie scolaire ou plutôt le refus scolaire anxieux (RSA), explique la docteure Marie-Rose Moro, pédopsychiatre et directrice de la maison des adolescents “ la Maison de Solenn ” à l’hôpital Cochin*, se manifeste par des troubles du comportement comme le repli sur soi, un absentéisme scolaire, des troubles du sommeil, un mal de ventre, de tête… Elle disparaît lors des vacances. »
Les origines sont multifactorielles : un deuil dans la famille, un événement traumatique comme du harcèlement scolaire, du racket, ou encore un problème avec l’autorité. Mais il y a aussi des causes sociologiques qui atteignent les jeunes les plus fragiles : la crise sanitaire, écologique… « Quand le parent sent que son enfant est submergé par sa peur, qu’il n’arrive plus à aller en classe et qu’il va mal dès qu’il pense à l’école, il faut réagir vite et consulter », suggère la docteure Moro. Les solutions sont globales.
Il faut s’appuyer sur l’ensemble de l’équipe pédagogique, le pédiatre, le médecin traitant. Souvent, un suivi psychologique devient nécessaire. Les thérapies comportementales et cognitives (TCC) s’avèrent plutôt efficaces. En deuxième intention, un traitement médicamenteux à base d’antidépresseurs et d’anxiolytiques peut soulager les pics d’angoisse. Mais il ne peut à lui seul constituer une solution sur le long terme.
Un programme spécial au CHU de Montpellier
Depuis une quinzaine d’années, la docteure Hélène Denis, pédopyschiatre, dirige un centre spécialisé dans le refus scolaire anxieux au CHU de Montpellier.
« Les adolescents sont accueillis en hôpital de jour, quatre jours et demi par semaine. Notre objectif est de les sortir de la maison et qu’ils retournent ensuite à l’école le plus vite possible, en respectant leur rythme et en les accompagnant », détaille la pédopsychiatre.
Dans cette petite unité de dix places, le programme dure l’année scolaire. Pour le volet études, une enseignante garde le lien avec l’établissement scolaire de l’adolescent et des psychologues, spécialisés en thérapies cognitives et comportementales, suivent les jeunes. « Nous avons de bons résultats avec les TCC, explique la docteure Denis, je peux dire que dans 90 % des cas, les jeunes reprennent le chemin de l’école avec très peu de récidives. » Car l’anxiété est un cercle vicieux. « Ici, nous leur apprenons à mieux gérer leurs symptômes. A sortir de la stratégie de l’évitement. »
Relaxation, respiration
Les TCC utilisent aussi des techniques comme la respiration et la relaxation qui permettent de diminuer le rythme cardiaque et respiratoire en cas de crise ou d’attaque de panique. La réintégration de ces élèves dans l’établissement se fait de façon progressive (deux heures hebdomadaires accompagnés pendant trois semaines, puis deux heures par semaine seuls, etc.), avec poursuite de l’hospitalisation de jour.
Puis, les adolescents sont suivis pendant une année pour consolider le traitement. Les parents aussi sont dans la boucle. Ils sont partie prenante du programme. Conviés à des consultations une fois par mois, ils participent à des réunions où ils peuvent partager leur expérience. Un programme complet qui devrait faire des émules.
Le RSA en chiffres
Le refus scolaire anxieux (RSA) concernerait 1 à 5 % des enfants et adolescents d’âge scolaire. Son pic de fréquence se situe au moment de l’entrée au collège, autour de 11 ans, et vers 13- 15 ans. Pour en savoir plus : phobie-scolaire.org
* La docteure Marie-Rose Moro a dirigé l’ouvrage « Phobie scolaire, retrouver le plaisir d’apprendre » (Editions Vigot).