Retraites : « Une atteinte majeure à la Sécurité sociale » pour Catherine Perret (CGT)

Catherine Perret

La réforme des retraites a été adoptée en première lecture à l’Assemblée nationale le mardi 3 mars par le biais de l’article 49-3 de la Constitution et suite au rejet des deux motions de censure de l’opposition.

Dans ce contexte, la négociatrice « retraites » de la CGT, Catherine Perret, explique pourquoi la CGT vient de quitter la Conférence de financement : « l’âge pivot à 64 ans sera in fine imposé ». Demandant toujours le retrait du texte, elle déplore un projet de loi qui désavantage les femmes, les précaires et ceux qui, dans des métiers pénibles, ne pourront plus partir en départ anticipé. « Si ce projet allait au bout, il en serait fini du principe de la Sécurité sociale : chacun cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».

– La CGT a décidé de quitter la Conférence de financement. Pouvez-vous expliquer pourquoi ?

La CGT a pris la décision de quitter la conférence de financement car elle a fait des propositions concrètes et étayées en matière de réforme des retraites améliorant le système actuel, lors de la première réunion et la seule réponse du gouvernement c’est de  recourir au 49-3 en confisquant le débat démocratique sur ce projet de loi. Ce dernier confirme donc que la conférence est morte et qu’il décidera in fine d’imposer l’âge pivot à 64 ans puis très vite à 65 ans et sans limite pour les générations futures.

– Quelles sont vos principales critiques à l’égard de cette réforme ?

Cette réforme est avant tout une réforme idéologique et budgétaire destinée donc à diminuer la part des richesses consacrée aux retraites en jouant sur la baisse des pensions de toutes et tous et sur le recul de l’âge de départ à la retraite en imposant une décote avant l’âge pivot ou âge d’équilibre du système.

Tous les salariés sont perdants mais encore plus particulièrement les femmes dont aujourd’hui déjà  une part importante de la retraite est constituée d’éléments de solidarité interne au système par répartition et par annuités issus de la création de la Sécurité sociale. Avec le régime à points voulu par Emmanuel Macron, ce qui n’est pas cotisé ne compte pas ou  seulement partiellement.

Ce système désavantage également les jeunes, ceux qui ont des contrats précaires, ceux qui connaissent des périodes de chômage, voire les personnes malades,  ou usées par un travail pénible qui ne pourront plus partir en départ anticipé à la retraite avant 60 ans ou à 60 ans.

On ne cesse de nous parler de points, d’âge pivot, de carrière complète, de transition progressive pour les personnes nées après 1975 mais ces mots restent sans réelle définition. C’est un projet à trous aux multiples inconnus. Qui  sait quelle valeur aura le fameux point ? Qui sait à quel âge il pourra partir à la retraite ?  Qui sait combien d’années il faudra travailler pour avoir une carrière complète ? Combien de points pour avoir une retraite à 1200 euros, 1500 euros, 2000 euros…? Si ce projet est si bien, pourquoi le gouvernement ne l’applique pas à tout le monde tout de suite ? Qui connait le calcul des retraites pour les personnes nées après 1975 ? Comment le gouvernement va convertir les trimestres en points ?

– L’un des principaux enjeux de la réforme va être la fixation de la valeur du point. Quel devrait être le rôle des partenaires sociaux dans la gouvernance du nouveau système ?

La CGT demande le retrait du projet de loi et ne participe donc pas au groupe de travail sur ces questions, mais force est de constater que l’ensemble des organisations syndicales de salariés conteste les objectifs gouvernementaux en matière de gouvernance.

– Pensez-vous que nous allions vers une étatisation de la Sécurité sociale avec cette réforme, mais aussi avec celle de l’assurance-chômage, et la non-compensation des exonérations ?

Ce projet est une atteinte majeure à la Sécurité sociale et à l’ensemble des branches. Le gouvernement vise à étatiser la protection sociale en conditionnant le versement des prestations sociales au budget chaque année, contraint lors de la loi de finances. Si ce projet allait au bout, il en serait fini du principe « chacune cotise selon ses moyens et reçoit selon ses besoins ».