« Les Mutuelles de France prendront toute leur place dans ce front populaire »

Jean-Paul Benoit, président de la Fédération des Mutuelles de France (FMF) © Marta Nascimento.
Jean-Paul Benoit, président de la Fédération des Mutuelles de France (FMF) © Marta Nascimento.

Dans un communiqué, la Fédération des Mutuelles de France (FMF) appelle toutes les forces sociales progressistes à se mobiliser pour mettre en échec le Rassemblement national lors des élections législatives consécutives à la dissolution de l’Assemblée nationale. Jean-Paul Benoit, président de la FMF, nous explique les enjeux du scrutin.

Pourquoi les Mutuelles de France ont-elles tenu à s’exprimer au sujet de la crise politique que traverse notre pays ?

Jean-Paul Benoit : Nous sommes un mouvement mutualiste, c’est-à-dire un mouvement social qui travaille à la solidarité et à l’accès aux soins pour toute la population. Les évolutions politiques nous concernent donc directement, en particulier avec ce qui vient de se passer aux élections européennes et ce qui risque d’arriver dans les semaines à venir. Si l’extrême droite, dont les valeurs sont totalement opposées aux nôtres, arrive au pouvoir, nous aurons beaucoup plus de mal à assurer notre mission. Une mission qui est déjà fort compliquée compte tenu de la crise actuelle des systèmes de protection sociale et de santé.

 Les Mutuelles de France sont issues de la Résistance. Nous n’avons jamais cessé de combattre l’extrême droite et nous ne cesserons jamais de la combattre.

Je rappelle, en outre, que les Mutuelles de France sont issues de la Résistance. Nos premiers dirigeants de mutuelles de travailleurs, comme Louis Calisti ou Lucien Molino, ont tous été résistants. Nous n’avons jamais cessé de combattre l’extrême droite et nous ne cesserons jamais de la combattre quels que soient les résultats des élections présentes ou futures. Nous ne transigerons jamais avec cette partie indigne du spectre politique. Nous dénoncerons ses mensonges et son indécence de façon continue.      

Selon vous, la dissolution de l’Assemblée nationale par le président de la République est « un coup politique ». Pouvez-vous développer ?

J-P. B. : Pendant toute la campagne des européennes, Emmanuel Macron a répété que cela ne concernait que l’Europe. Juste après les résultats, coup de théâtre, il annonce la dissolution de l’Assemblée nationale. Il le fait comme à son habitude, du haut de l’Olympe, avec toute l’arrogance qui le caractérise, et surtout dans des conditions qui ne permettent pas un vrai débat. Il y a là une volonté de brusquer le calendrier, d’empêcher une véritable campagne qui permettrait de poser les vrais problèmes du pays.

Ce n’est pas en vingt jours que l’on va résoudre les difficultés, qui se sont d’ailleurs accumulées en grande partie à cause de sa politique brutale et autoritaire. Ce coup est typique de sa méthode. Emmanuel Macron se pose, une nouvelle fois, comme barrière au Rassemblement national. Mais cette soi-disant barrière est devenue en réalité un marchepied pour l’extrême droite. Depuis qu’il est à la tête de l’Etat, le Rassemblement national n’a cessé de progresser.

Que répondez-vous à ceux qui seraient tentés par un vote RN et selon lesquels l’extrême droite serait finalement la seule solution pour améliorer leur pouvoir d’achat ?

J-P. B. : Je comprends tout à fait les difficultés et les souffrances sociales. Dans le domaine qui nous concerne, celui de la santé, nous les constatons et nous les vivons tous les jours avec les problèmes de nos adhérents pour accéder à des soins de plus en plus coûteux et soumis aux dépassements d’honoraires. Mais le Rassemblement national est le contraire de la solution à ces problèmes. C’est un mouvement qui va continuer à gouverner pour les riches et casser les solidarités, notamment en abaissant encore les cotisations sociales qui financent les droits sociaux de la population. Il ne faut surtout pas se laisser berner.

Et puis, n’oublions pas, tout de même, l’aspect xénophobe de ces mouvements d’extrême droite. Là-dessus je n’ai aucune indulgence. Je sais bien qu’il y a la pression de certains médias, qui lient, de façon scandaleuse et honteuse, les problèmes d’insécurité à l’immigration. Tout cela peut peser. Je comprends ce qui peut conduire à la révolte, mais pas que cela se matérialise pour certains par un vote pour le pire. L’histoire nous a montré ce à quoi on arrivait avec ce type de réflexe.

Depuis hier, on assiste à un sursaut de la part de personnalités du monde du travail, de la culture, des syndicalistes et de certains politiques qui appellent à une union, une sorte de front populaire contre l’extrême droite. Pensez-vous que la gauche et toutes les forces sociales progressistes parviendront à s’unir une nouvelle fois ?

J-P. B. : En tout cas, les premières réactions ont été plutôt positives, à la fois rapides, responsables et efficaces. Il y a déjà eu la quasi-totalité des organisations syndicales hier soir, puis la prise de position des partis de gauche qui appellent effectivement à la constitution d’un front populaire composé des partis politiques mais aussi du mouvement social, des associations et de l’ensemble des corps constitués qui veulent résister à l’extrême droite.

De notre côté, nous allons réunir nos instances en urgence et je ne doute pas que les Mutuelles de France prendront toute leur place dans ce front populaire. Nous étions du premier, nous serons du second. Nous espérons qu’il se mettra concrètement en place pour empêcher le Rassemblement national d’arriver au pouvoir, mais aussi pour constituer une véritable alternative de progrès social, de solidarité, d’égalité et de respect des valeurs de la République.

Nous avons déjà appelé nos militants à participer aux actions sociales unitaires qui auront lieu ce week-end et nous engagerons toutes nos forces pour éviter la catastrophe. L’extrême droite se combat avant qu’elle n’arrive au pouvoir. Elle se combat aussi après, mais dans des conditions bien plus mauvaises et parfois à un prix très cher pour la solidarité, voire pour les vies humaines.