La Fédération des Mutuelles de France (FMF) et Médecins du Monde organisent conjointement deux demi-journées d’étude dédiées à au droit à la santé pour tous et partout. Organisé les 3 et 9 février, et retransmis en direct sur Internet, cet événement permettra aux acteurs de terrain associatifs et mutualistes, ainsi qu’aux professionnels de santé et aux universitaires de mettre en commun leurs constats sur la crise actuelle du système de soins, et leurs solutions pour défendre l’universalité de la santé. A quelques jours des débats, Delphine Fanget, chargée de plaidoyer chez Médecins du Monde et Pascale Vatel, secrétaire générale de la FMF, rappellent dans une interview croisée l’urgence d’inscrire l’accès aux soins dans le débat public.
Comment est né le partenariat entre la Fédération des Mutuelles de France et Médecins du Monde ?
Pascale Vatel (FMF) : Nous nous étions rencontrés à plusieurs reprises, à l’occasion d’événements ou d’initiatives autour de la santé. Lors du congrès des Mutuelles de France, en octobre 2020, nous avions invité le président de Médecins du Monde à la table ronde inaugurale. Nous avions besoin de leur vision d’acteur de terrain pour échanger sur les conséquences de la crise sanitaire et dégager les pistes pour construire des solidarités nouvelles. Ce moment a révélé une vision commune du droit à la santé pour tous. Nous nous sommes aussi retrouvés peu de temps après pour défendre l’Aide Médicale d’État que le gouvernement attaquait une nouvelle fois. Au-delà de nos identités respectives, mutualiste ou associative, nous sommes avant tout des acteurs engagés pour favoriser un égal accès de tous à la santé, à la fois dans nos réalisations concrètes et dans nos actions politiques. Chacune de nos rencontres est l’occasion de faire mûrir nos réflexions et nos propositions.
Delphine Fanget (MDM) : Compte-tenu du contexte actuel et de l’aggravation des problématiques de santé, il nous apparaît indispensable de construire de nouvelles alliances pour continuer à défendre l’accès aux soins pour tous. Les difficultés préexistantes à la pandémie se sont encore exacerbées : le système hospitalier s’effondre, la médecine de ville est sous pression, la démographie médicale continue de baisser… Et ces inégalités sociales et territoriales ne cessent de se creuser. C’est en unissant nos forces, en se regroupant entre acteurs de la santé que nous aurons les moyens d’agir. Pour leur action en faveur de la protection sociale et leur gestion des centres de santé, la FMF apparaît comme un partenaire intéressant, avec qui nous partageons des causes et complémentaire dans ses champs d’expertise.
C’est en unissant nos forces, en se regroupant entre acteurs de la santé que nous aurons les moyens d’agir
Delphine Fanget, chargée de plaidoyer chez Médecins du Monde
Quelle est la vocation de cette alliance ?
Delphine Fanget (MDM) : Les discussions que nous avons pu avoir avec la FMF nous ont permis de mieux décrypter certains enjeux de la protection sociale, notamment sur la Sécurité sociale et son financement ou encore sa gouvernance. De notre côté, nous tenons à apporter un éclairage circonstancié sur les difficultés d’accès aux soins pour les populations les plus précaires, et plus particulièrement les étrangers et les demandeurs d’asile dont les droits ne cessent de reculer… Il nous paraît important aujourd’hui d’élargir la réflexion et de partager constats et analyses avec différents types d’acteurs du système de santé, dont la Fédération des Mutuelles de France pour penser et défendre un système solidaire universel.
Pascale Vatel (FMF) : Nous avons suffisamment en commun pour nous parler et nous sommes suffisamment différents pour nous enrichir mutuellement. Nous avons déjà beaucoup appris l’un de l’autre. L’organisation par la FMF et Médecins du Monde de ces journées de réflexion sur l’évolution de notre système de santé et de protection sociale constitue une nouvelle étape de notre partenariat. La préparation de cette initiative nous donne aussi l’occasion de réunir autour de nous d’autres acteurs qui vont contribuer au débat. Nous intensifions ainsi notre travail commun de sensibilisation et de propositions. Les militants du mouvement social, associatifs, mutualistes, syndicaux, les professionnels de santé invités mettront leurs expériences en débat pour tirer les leçons de la crise et proposer, alors que le débat présidentiel s’amorce, une autre politique de santé.
Quel est l’objectif des journées d’études organisées les 3 et 9 février ?
Pascale Vatel (FMF) : Notre ambition commune est d’inscrire la santé dans le débat public. Paradoxalement, alors que nous sommes toujours en pleine crise COVID, le sujet de la santé n’émerge pas dans le débat public. Ces journées d’étude ont vocation à mettre en lumière les inégalités persistantes et même grandissantes dans l’accès aux soins et faire des propositions pour sortir la santé de la logique marchande dans laquelle elle est de plus en plus orientée. Nous entendons ainsi peser pour une politique qui rende effectif le droit universel à la santé.
Delphine Fanget (MDM) : Effectivement, il est essentiel de rendre visible les enjeux du système de santé, surtout en cette période électorale. De remonter les constats faits par les acteurs de terrain soignants et non soignants et de pousser les candidats prendre parti pour un égal accès aux soins de tous.
Notre ambition commune est d’inscrire la santé dans le débat public.
Pascale Vatel, secrétaire générale de la Fédération des Mutuelles de France
Quelles thématiques seront abordées à cette occasion ?
Delphine Fanget (MDM) : Nous avons construit le programme de ces journées en collaboration avec la Fédération des mutuelles de France. L’idée était d’inviter différents types d’acteurs, professionnels de santé, universitaires, syndicats, pour mutualiser les points de vue et les expériences et créer une émulation collective. Ainsi, en plus des temps d’interventions formels avec les invités, il y aura des moments d’échanges avec les participants, comme les organisations du mouvement social, les journalistes, les professionnels de la santé… Ensemble, nous allons partager les constats faits au quotidien sur la crise actuelle du système de soins. Et mettre en commun les solutions de chacun d’entre nous pour réaffirmer le droit universel à la santé.
Pascale Vatel (FMF) : Si le système de protection sociale a pu démontrer son efficacité pendant la crise du Covid, il a également mis à nu de graves manquements à son principe d’universalité. Nos réflexions communes nous ont amené à centrer les débats sur trois thèmes principaux : l’accès aux soins, la politique du médicament et la mise en sécurité sociale de l’ensemble de la population. Nous voulons, en effet, proposer des solutions concrètes et agir pour le progrès social.