Le député Benoît Hamon a lancé une pétition sur Facebook afin que le burn out soit reconnu comme maladie professionnelle. En voici le texte.
En France 3,2 millions de Français sont exposés à un risque élevé de « burn out »[1].
Ce syndrome d’épuisement professionnel frappe sans distinction cadres et simples employés, salariés du public comme du privé. Il est la conséquence d’un trop-plein de travail, d’un trop-plein de pressions, qui mènent des hommes et des femmes à l’effondrement.
La mondialisation économique a profondément bouleversé le fonctionnement des entreprises. Confrontées à une compétition désormais mondiale, les entreprises se sont adaptées. Très vite, de nouvelles formes de management et d‘organisation du travail ont transformé en profondeur le quotidien de millions de salariés, soumettant ceux-ci à des évaluations de performance de plus en plus exigeantes. Les nouvelles technologies ont accéléré le mouvement, maintenant le lien entre les individus et leur travail bien au-delà du temps réel passé dans l’entreprise.
Ce travail qui colonise la vie est souvent la première étape d’un processus qui s’achève par des pathologies physiques et psychiques lourdes et durables. La souffrance au travail est le mal de notre temps, comme l’exploitation des femmes et des enfants ou les conditions d’hygiène et de sécurité des travailleurs ont été la face sombre de la révolution industrielle au XIXe siècle.
Pourquoi faciliter la reconnaissance de l’épuisement professionnel ?
Il vaut mieux prévenir que guérir et favoriser la mise en œuvre d’organisations du travail en entreprise qui soient à la fois bienveillantes et performantes. Aujourd’hui, les pathologies issues d’un burn out sont prises en charge par l’assurance-maladie. Si ces pathologies étaient reconnues comme maladies professionnelles, elles seraient prises en charge par la branche accidents du travail–maladies professionnelles » financée à 97 % par les cotisations des employeurs. Or, le montant des cotisations que paient les employeurs dépend directement de la sinistralité et des résultats propres à chaque entreprise quant aux accidents et aux maladies professionnelles comptabilisées en leur sein. Les entreprises seraient donc financièrement incitées à intégrer l’impact de la souffrance au travail dans leur politique managériale et leur organisation du travail. Reconnaître le syndrome d’épuisement professionnel, c’est aussi garantir des droits aux salariés touchés. En effet, une fois reconnu le caractère professionnel de la maladie, les soins médicaux sont couverts et une indemnité journalière permet de compenser la perte de revenu entraînée par l’arrêt de travail. Le salarié est alors protégé, son contrat de travail est suspendu et il ne peut être licencié qu’en cas de faute grave.
Comment faciliter la reconnaissance de l’épuisement professionnel ?
La première voie consiste à inscrire le syndrome d’épuisement professionnel au tableau des maladies professionnelles. Cette option suppose un accord des partenaires sociaux, irréalisable en l’état en raison du refus des organisations patronales d’avancer sur la reconnaissance du burn out en tant que maladie professionnelle.
L’autre voie consiste faciliter l’instruction et la reconnaissance individuelle des cas de burn out par les comités régionaux de reconnaissance des maladies professionnelles.
Aujourd’hui, engager une telle procédure pour un salarié nécessite un taux minimum d’incapacité permanente partielle (Ipp) de 25 %. En pratique, ce seuil élimine l’écrasante majorité des cas de burn out.
Cet obstacle à l’instruction des dossiers ne fait que renforcer le sentiment de solitude des victimes de burn out, chacune d’entre elles se heurtant à l’impossibilité qui lui est faite de voir reconnaître la responsabilité directe de son travail dans la situation d’épuisement dont elle est victime.
C’est la raison pour laquelle nous soutenons la proposition de loi déposée par plusieurs députés pour que ce seuil soit supprimé, comme c’est aujourd’hui le cas en Suède, ouvrant la possibilité d’instruire tous les dossiers sans distinction. Mais instruction ne veut pas dire reconnaissance automatique. Les comités régionaux, dont la composition sera renforcée et ouverte à davantage de professionnels spécialistes des risques psychosociaux, pourront enfin identifier l’étendue et la réalité des pathologies psychiques liées au travail en France et favoriser une meilleure prévention du burn out.
Pour que cette proposition de loi soit inscrite à l’ordre du jour des travaux de l’Assemblée nationale, je signe la pétition en faveur de la reconnaissance du burn out comme maladie professionnelle.
[1] Etude du cabinet Technologia, publiée en mai 2014.