Coup d’envoi de la télémédecine en France 

Viva Magazine
© Viva Magazine

En juin dernier, un accord conventionnel était trouvé entre l’assurance-maladie et les syndicats représentant les médecins libéraux sur les modalités de déploiement de la télémédecine en France dès le 15 septembre. La télémédecine va devenir une réalité. Ce nouveau mode de consultation n’est pas pour autant la panacée. Il ne pourra résoudre à lui seul la question du manque de médecins et les déserts médicaux. Rien ne remplacera jamais, non plus, la clinique.

L’accord officialise et encadre deux types d’actes :

– A partir du 15 septembre, la téléconsultation, qui implique une consultation à distance entre un médecin et un patient, ce dernier pouvant être assisté par un autre professionnel de santé comme une infirmière, par exemple, va se développer dans un cadre légal.

En février 2019, la télé-expertise, qui permet à un médecin de solliciter l’avis d’un confrère face à une situation médicale donnée. Ouverte dans un premier temps à certaines catégories de personnes, elle s’élargira à tous les patients à partir de 2020. Pour autant, comme le souhaitaient conjointement les partenaires conventionnels, son application devra respecter un certain nombre de garanties liées à la sécurisation et à la protection des données médicales, mais aussi au respect des principes de qualité et de bonne organisation des soins (respect du parcours de soins coordonné, connaissance préalable du patient par le médecin). Ces pratiques vont s’étendre progressivement à d’autres catégories de professionnels de santé, en commençant par les infirmiers et les pharmaciens. Jusqu’à présent, la télémédecine était conçue et déployée dans un cadre expérimental, avec des financements limités fixés par des fonds d’interventions régionaux, sans aucun cadre commun défini permettant une généralisation rapide de la pratique. La conséquence est que la télémédecine s’est surtout développée à l’hôpital, elle reste très peu présente en ville et la France est globalement en retard par rapport aux pratiques des autres pays en la matière. 

Pour qui ? 

En abolissant les distances, la téléconsultation permet en effet de simplifier l’accès à un médecin pour des patients rencontrant des problèmes de mobilité. 

En raccourcissant les délais, pour des question ne justifiant pas nécessairement une consultation médicale parfois longue à obtenir, la téléexpertise permet d’accélérer les délais de prise en charge et de suivi, en obtenant plus rapidement un avis de spécialiste, évitant ainsi une aggravation de l’état d’un patient pouvant aller jusqu’à l’hospitalisation voire la ré-hospitalisation. 

La télémédecine est aussi un moyen d’éviter des déplacements inutiles et des passages des patients aux urgences. 

Enfin, la télémédecine, grâce au développement de la télé-expertise, devrait permettre aux professionnels de gagner du temps et ainsi de libérer un temps médical dont on sait bien combien il est précieux. 

Ce nouveau mode de consultation n’est pas pour autant la panacée. Il ne pourra résoudre à lui seul, la question du manque de médecins et les déserts médicaux. Rien ne remplacera jamais, non plus, la clinique

A partir de quand ? 

Tout assuré, quel que soit son lieu de résidence, et tout médecin quelle que soit sa spécialité, pourra recourir à ce type de consultation, et ce dès le 15 septembre 2018. 

Comment sera-t-elle réalisée ?
Le patient doit être connu du médecin traitant, qui détient le dossier médical et connait son parcours et son historique. 

La téléconsultation s’inscrit en effet dans un parcours de soins et doit donc passer par le médecin traitant sauf pour les spécialistes que l’on peut déjà consulter en accès direct et les patients de moins de 16 ans. 

Pour répondre aux difficultés d’accès aux soins, notamment dans certains territoires quand le patient n’arrive pas à désigner un médecin traitant ou que ce dernier n’est pas disponible dans le délai compatible avec l’état de santé du patient, le principe est de s’appuyer sur la mise en place d’organisations locales qui s’organisent autour d’un bassin de vie permettant le recours à la téléconsultation. Il peut s’agir de maisons de santé, de centres de santé qui pourront ainsi prendre en charge le patient et lui permettre d’accéder à un médecin par le biais notamment de la téléconsultation. 

Dans tous les cas, pour le patient, la téléconsultation se déroulera comme n’importe quelle consultation, en partant d’une demande de rendez-vous

Au niveau technologique, elle repose sur deux exigences : d’une part, le recours à un échange vidéo – exigé par la loi, pour garantir la qualité des échanges entre le médecin et le patient via une très bonne résolution d’image, et d’autre part, la connexion à une solution sécurisée, une exigence essentielle dans la mesure où elle fait transiter des informations à caractère médical dont la confidentialité doit être protégée. 

Concrètement, c’est le médecin qui va envoyer un lien au patient, l’invitant à se connecter vers un site ou une application sécurisés, via son ordinateur ou une tablette équipé d’une webcam. 

Pour les patients qui n’en disposent pas ou ne sont pas familiers de ces technologies, ils pourront être assistés par un autre professionnel de santé équipé, comme un pharmacien ou une infirmière venant à domicile, deux professions en contact très réguliers avec les patients. 

Sur conseil de son médecin, le patient pourra également se rendre dans une cabine de téléconsultation installée à proximité. Celle-ci offre, en outre, l’avantage de disposer d’appareils de mesures (poids, IMC) et d’examens facilitant le diagnostic (tensiomètre, stéthoscope, fond d’œil, otoscope pour lecture des tympans). Ces cabines sont déjà actuellement en cours de déploiement dans les maisons de santé, dans les pharmacies ou dans d’autres lieux publics, facilement accessibles aux patients. 

Combien ça coûte ? 

La consultation sera facturée au tarif de 25 € et 30 € selon les cas qu’elle se fasse en face-à-face ou via des nouvelles technologies. 

Les règles de prise en charge sont identiques, selon la répartition habituelle entre la part prise en charge par l’Assurance Maladie et par la part de la complémentaire (70 %/30 %) et à 100 % pour les soins concernant des affections longue durée.

Comme pour les consultations de visu, le tiers payant sera appliqué selon la situation du patient, soit dans son intégralité pour tous les patients en ALD, maternité, CMU-C, ACS, et pour les autres patients, il pourra l’être sur la seule part obligatoire en attendant la généralisation des services complémentaires. 

Les modes de paiement restent les mêmes que pour une consultation, y compris la possibilité de recourir au paiement en ligne par le patient, par carte bancaire. 

La carte Vitale ne pouvant être lue à distance, la feuille de soins sera émise sans, le patient étant connu de son médecin, et la vérification de ses droits sera faite via un service en ligne (ADRi). 

Et la télé-expertise ? 

La télé-expertise doit permettre à un médecin de consulter un confrère afin d’échanger sur le cas d’un patient. Elle peut impliquer un médecin généraliste et un autre spécialiste mais aussi deux médecins spécialistes
 
qui ont besoin d’échanger sur un diagnostic, une lecture d’analyses ou la pertinence d’examens complémentaire afin d’acter le traitement le plus adapté. 

Si cette pratique existe déjà de façon informelle, elle sera désormais rémunérée et c’est une des grandes nouveautés de l’accord. 

Qui est concerné ?
Dans un premier temps, et ce jusqu’en 2020, ces actes seront réservés aux patients

– en affection longue durée (ALD),

– atteints de maladies rares comme, par exemple, la mucoviscidose ou l’hémophilie

– résidant en zones dites « sous denses » et dès lors qu’ils n’ont pas de médecin traitant ou rencontrant des difficultés à consulter rapidement

– résidant en établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou  dans des structures médico-sociales,

– détenus, en raison de leur état de santé souvent insuffisant. 

Au total, cela concernerait jusqu’à 21,7 millions de personnes en France. 

• Ses modalités 

Contrairement à la téléconsultation, la télé-expertise n’exige pas un échange avec de la vidéo. Mais elle doit faire l’objet d’un échange entre deux médecins, via une messagerie sécurisée, déjà utilisée par 50 % des praticiens libéraux. Elle permet d’examiner le dossier d’un patient, accompagné des données médicales utiles (clichés, tracés, analyses) transmis au confrère.

Comme pour tout acte de télémédecine, le médecin demandant une télé-expertise préviendra le patient afin de recueillir son consentement, dans le respect absolu de sa liberté de choix.