En avril dernier, nous avions interviewé le candidat d’En marche ! à la présidentielle. Aujourd’hui président de la République, Emmanuel Macron veut faire participer les complémentaires santé à ce qu’il nomme « une révolution de la prévention ». S’engageant à la hausse jusqu’à 100 % de certains remboursements (lunettes, audio, dentaire), il prévoit aussi d’améliorer la couverture complémentaire des étudiants, des chômeurs et des retraités et envisage d’investir « plusieurs milliards » dans la santé. Défendant « un système fondé sur la solidarité », l’ancien ministre de l’Economie précise ne pas vouloir remettre en cause l’Ame et ne pas vouloir distinguer petit et gros risques.
– Comment voyez-vous l’articulation entre assurance-maladie de base et complémentaires santé ? Quel devrait être, selon vous, le panier de soins remboursable par l’assurance-maladie ?
La mesure phare que nous défendons reste sans conteste la préservation, le renforcement même, d’un système fondé sur la solidarité, dans lequel chacun cotise selon ses moyens, reçoit selon ses besoins. Ainsi, nous ne remettrons pas en cause l’aide médicale d’Etat, nous ne distinguerons pas petit et gros risques dans le remboursement des soins, et nous supprimerons le reste à charge sur des soins indispensables et pourtant peu accessibles. Je m’engage notamment à ce qu’aucun soin utile ne soit déremboursé dans les cinq années à venir.
Aujourd’hui, nombreux sont ceux qui renoncent encore à des soins en raison des frais qui restent à leur charge, ou des difficultés pour trouver un médecin près de chez eux. Demain, nous améliorerons la couverture des soins de santé pour tous, nous renforcerons leur accessibilité sur tous les territoires, tout en garantissant leur qualité.
En outre, nous nous fixons l’objectif d’atteindre 100 % de prise en charge pour les soins audio, les lunettes et les prothèses dentaires d’ici à 2022. Cet objectif sera atteint sans augmenter le prix des mutuelles. En effet, nous favoriserons la concurrence, et la transparence pour les usagers, dans le cadre d’un travail concerté avec assureurs et mutuelles.
Je m’engage également sur une autre mesure inédite : le choix d’un budget pluriannuel, avec l’engagement d’augmenter en moyenne les dépenses de santé de 2,3 % chaque année sur toute la mandature pour améliorer les transformations de notre système de santé que je souhaite mener à bien.
– L’Ani, soit la complémentaire obligatoire en entreprise, a abouti à une forte segmentation des couvertures : Cmu, Acs, complémentaire en entreprise, complémentaire seniors, complémentaire individuelle. Envisagez-vous une réforme pour sortir de cette complexité ?
Nous ne pouvons relever les défis en matière de santé qu’en collaboration avec le secteur mutualiste. Les complémentaires santé constituent un maillon historique de notre système. Nous ferons évoluer leurs missions, afin de renforcer la couverture de tous les Français, et en particulier celle des publics les plus fragiles, à savoir les étudiants, les chômeurs, les retraités.
Il s’agit également d’améliorer la lisibilité et la transparence des complémentaires santé pour les consommateurs, et de favoriser leur rôle de prévention. Car celle-ci auront toute leur place dans notre révolution de la prévention, fortes de leur maillage territorial, de leur expertise, et de leur proximité avec les assurés sociaux. L’Etat saura les valoriser en retour pour cette mission.
Nous souhaitons plus généralement mobiliser tous les professionnels, toutes les énergies, et investir fortement dans le secteur de la santé, un secteur qui est créateur de ressources et d’emplois, et qui engendre des progrès pour l’humain.
Durant le quinquennat, plusieurs milliards seront investis pour renforcer les soins primaires dans les maisons de santé, l’innovation en santé sur les territoires ainsi que dans la modernisation de nos établissements de santé.
– Quelle est votre position sur le tiers payant généralisé ? Quelles sont les mesures que vous préconisez pour améliorer l’accès aux soins ?
Dès les premières semaines du mandat, nous ferons évaluer le dispositif du tiers payant, en particulier les bénéfices et les contraintes qu’il peut générer. Nous privilégions non pas un tiers payant généralisé, mais un tiers payant généralisable, simple et efficace, permettant aux professionnels d’en faire bénéficier leurs patients sans contrainte.
S’agissant des déserts médicaux, nous agirons à plusieurs niveaux. Nous engagerons tout d’abord un dialogue constructif avec les professionnels concernés, pour faire évoluer les métiers de la santé et réaliser des expérimentations dans nos territoires. D’autre part, nous porterons à 3 000 le nombre de maisons pluridisciplinaires de santé d’ici à 2022, afin d’inciter à l’installation dans les zones qui en ont besoin. Enfin, nous investirons massivement dans le numérique et la télémédecine pour permettre les consultations à distance, et améliorer le quotidien des malades et des aidants.