Comment évoluera la Sécurité sociale ? Relancé par le gouvernement, le Haut conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (Hcaam) a imaginé plusieurs pistes. Elles sont présentées cette semaine. Véritable changement ou coup de communication à la veille des élections nationales ?
Le Hcaam a travaillé quatre pistes. Une des pistes conserve l’actuelle répartition entre la Sécurité sociale et les complémentaire santé, en corrigeant les inégalités et en réduisant les reste à charge extrêmes. Une deuxième consiste à « ouvrir une liberté plus grande de niveau et de contenu des garanties » offertes par les organismes complémentaires.
Les deux autres scénarios semblent se dégager et méritent de s’y attarder.
Le premier est celui d’une protection maladie à trois niveaux. A la sécurité sociale obligatoire s’ajouteraient une complémentaire santé obligatoire et une seconde, non obligatoire.
Cette piste que le Hcaam se propose d’instruire figure une suite logique des tendances observées ces deux dernières décennies. L’accroissement de la règlementation appliquée aux organismes complémentaires pourrait dès lors conduire à la mise en place d’un deuxième niveau de couverture d’assurance maladie complémentaire très administré, avec des contrats-types, voire un encadrement des tarifs. Cette évolution évoque très clairement ce qui existe aujourd’hui au niveau des retraites, avec une forme d’Agirc-Arrco de la santé.
Ce scénario organiserait en réalité une articulation de trois niveaux. A la Sécurité sociale s’ajouterait une complémentaire non obligatoire, mais surtout un étage intermédiaire avec une homogénéisation d’une couverture complémentaire généralisée, voire obligatoire. On peut imaginer qu’un rôle accru en matière de gestion du risque pourrait être accordé aux complémentaires santé.
D’un autre côté, ce scénario, qui correspond à une étatisation de la couverture de la complémentaire de base limiterait la liberté de choix des assurés. Il correspondrait au développement d’assurances supplémentaires dérégulées avec, à coup sûr, des sélections médicales coûteuses de la part des organismes privés.
Le 100 % Sécu c’est 100 % de quoi ?
Second scénario qui s’apparente, à quelques mois des élections, à un coup de communication : « le 100 % Sécu », comme il y a eu, il y a a peu, le « 100 % santé ». Derrière les mots, le dispositif ne s’est pas avéré positif pour les Français. Loin de là.
Car, quand on parle de 100 % Sécu, il faut savoir de quoi l’on parle. C’est 100 % de quoi ? De tous les soins ? D’une partie seulement ? Et avec quel budget ?
Derrière la promesse d’un réengagement massif de la Sécurité sociale, se profile plus vraisemblablement un périmètre limité à la dépense, c’est-à-dire au niveau des tarifs de la Sécurité sociale. Sans volonté politique forte d’encadrer, voire de supprimer les dépassements d’honoraires médicaux, la terminologie même de « 100% Sécu » est trompeuse.
La Sécurité sociale sera amenée à prendre en charge des prestations qu’elle ne remboursait pas et cela se traduira mécaniquement par une hausse de ses frais de gestion : développements informatiques, dépassements tarifaires… Cette possibilité implique également que la Sécurité sociale couvre l’ensemble des dépenses relevant aujourd’hui des complémentaires.
Une prise en charge de la Sécurité sociale portée au niveau de la couverture actuelle par les complémentaires santé des dépassements tarifaires et des dépenses supplémentaires (chambre particulière…) s’élèverait à près de 31 milliards d’euros. Un scénario qui paraît peu crédible, car il nécessiterait une forte augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) de près de trois points.
Le système actuel présente des faiblesses, mais l’étatisation de la Sécurité sociale envisagé par cette appellation trompeuse de « 100 % Sécu » n’y apporterait pas de réponse.
Aucune décision ne pourra être prise et mise en oeuvre pour la préparation du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, cet automne. Ce qui laisse entendre que la Sécu et son financement pourraient être l’un des sujets de la prochaine élection nationale…