Une greffe de tête qui fait prendre la plume

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Sergio Canavero, neurorchirugien, travaille en vue de réaliser une première greffe de tête. Une opération controversée inspirante pour les écrivains

Vendredi, lors d’une conférence de presse tenue à Vienne (Autriche), le neurochirurgien italien Sergio Canavero a affirmé qu’il avait réalisé la première greffe de tête humaine post mortem. La communauté médicale est unanime pour dénoncer cette opération controversée.

Dans le cas présent, les deux hommes décédés avaient donné leur corps à la science et leurs familles avaient signé un consentement. Les scientifiques expliquent que deux équipes de cinq chirurgiens ont travaillé ensemble sur les deux cadavres, pour préparer la tête du « receveur » d’un côté et le corps du « donneur » de l’autre.

Le neurochirurgien italien travaille sur ce sujet depuis des années avec obstination. En 2015, Sergio Canavero avait déjà provoqué une onde de choc en promettant une première greffe de tête humaine avant la fin 2017. Mais ce n’était que la plus récente étape d’une vaste entreprise médicale et médiatique amorcée deux ans plus tôt par la publication d’un article controversé exposant le projet. Scientifiques, journalistes bioéthiciens, théologiens, blogeurs avaient tenté d’en prendre la mesure. C’est dans ce labyrinthe que s’aventure cet essai du philosophe Philippe Saint-Germain (1). Tout en décrivant le projet d’une greffe de tête humaine, il en rappelle la préhistoire – littéraire et scientifique – et en approfondit les enjeux éthiques et philosophiques. Monstruosité ou exploit ; il se déploie ainsi entre la science et la fiction, suivant, en cela, le Dr Canavero lui-même qui, à certains égards, ressemble au savant fou d’un étrange feuilleton.

Cette même greffe de tête a inspiré le romancier Bertrand Leclair (2) : « En 2013, j’étais tombé sur un article du Monde intitulé : « Un médecin italien veut greffer des têtes humaines ». Il y était expliqué qu’un chercheur turinois, Sergio Canavero, prévoyait de mener à bien la greffe de tête d’ici à trois ans. Il affirmait avoir surmonté la seule difficulté qui jusqu’ici rendrait impossible la greffe de tête, à savoir la préservation de la moelle épinière durant l’opération impliquant simultanément un donneur et un receveur. »

Au cours de l’écriture de son roman, Bertrand Leclair apprend que Canavero poursuit ses recherches en Chine, à l’invitation des autorités médicales du pays, « et l’on sait que ce pays est celui de tous les trafics d’organes où les condamnés à mort sont un inépuisable réservoir de donneurs “volontaires” alimentant un tourisme de transplantation d’organes ». Ce sera la toile de fond de ce roman déconcertant, polar haletant aux péripéties loufoques, que le lecteur parcourt sans plus vraiment savoir si tout ce qu’il lit est vrai ou s’il est juste, comme Wallace le héros, en train, lui ausi, de Perdre la tête

(1) Philippe Saint-Germain enseigne la philosophie au collège Ahuntsic (Montréal). Aux éditions Liber, il a publié La culture des contraires (2011), La culture recyclée en dix chapitres réutilisables (2012) et L’imaginaire de la greffe, Le même et l’autre dans la peau (2015).

« La greffe de tête entre science et fiction » Editions Liber

 

2) Bertrand Leclair est un journaliste et écrivain français, auteur d’une vingtaine de romans. Il aime aborder les questions qui touchent au corps, au handicap et à l’éthique.

« Perdre la tête » : Editions mercure de France

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