Solitude et handicap ou maladie: la double peine

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A l’occasion de la Journée internationale des personnes handicapées, le 3 décembre dernier, la Fondation de France a dévoilé les résultats de son étude 2018 sur les solitudes en France consacrée, cette année, aux personnes handicapées ou malades. 12 % subissent une double peine : vivre avec un handicap ou une maladie chronique et être isolées.

Problèmes de douleurs, de fatigue ou encore de mobilité, temps consacré aux soins ou aux démarches administratives… Comment  faire pour avoir une vie sociale quand un handicap ou une maladie chronique mobilise tout le temps et toute l’énergie du quotidien ? 

Depuis 2010, la Fondation de France dresse chaque année un état des lieux de l’évolution des solitudes en France. L’édition 2018 de cette enquête quantitative et qualitative, menée avec le Credoc, s’est intéressée spécifiquement à la solitude des personnes en situation de handicap ou souffrant d’une maladie chronique ou de longue durée : 32 % se sentent seules (vs 22 % en population générale), et 8 sur 10 en souffrent.

62 % des personnes handicapées ou malades et isolées déclarent que leur handicap ou leur maladie a des incidences négatives sur leurs sorties quotidiennes. Douleur, fatigue ou difficultés de mobilité les obligent à renoncer à créer ou entretenir une vie sociale. Parfois, le renoncement est temporaire, en fonction des périodes de crise ou de répit : 50 % des personnes déclarant un handicap ou une maladie sont impactées de façon irrégulière, avec des crises et des périodes plus calmes, un manque de prévisibilité constituant un frein à la sociabilité.

L’enquête considère comme isolées les personnes ayant des contacts physiques, au-delà du simple « bonjour », à une fréquence inférieure à plusieurs fois par mois avec les cinq réseaux de sociabilité : famille, amis, voisins, collègues, membres d’une association. Cette définition ne préjuge pas du sentiment de solitude.

Les témoignages montrent également que, pour les personnes handicapées ou malades, le temps consacré aux soins ou aux démarches administratives empiète sur les autres temps de la vie : les moments passés entre amis ou en famille, la vie professionnelle pour ceux qui ont un emploi, et cela en plus de la gestion du quotidien (courses, ménage…). Dans certaines situations, toute l’énergie des personnes est mobilisée pour cette prise en charge, ne laissant plus de place à une vie sociale.

Le cercle vicieux de l’isolement

Le handicap ou la maladie chronique ont évidemment un impact lourd sur les facteurs qui favorisent l’isolement. Lorsque la personne vit avec l’un et/ou l’autre et est effectivement isolée, elle subit une double peine dans tous les domaines de la vie.

C’est le cas pour la scolarité : 73 % des personnes déclarant un handicap ou une maladie et isolées ont un niveau de formation inférieur au baccalauréat.

C’est aussi le cas pour la vie professionnelle : arrêts de travail prolongés ou répétés, licenciement pour inaptitude, retraite anticipée pour invalidité sont des exemples de freins pour l’emploi des personnes avec un handicap ou une maladie chronique. 58 % de ces personnes qui sont isolées estiment que leur handicap ou maladie a un impact négatif sur leur vie professionnelle. Au final, cette fragilité devient économique car 31 % ont de bas revenus ce qui peut entraîner une réduction des moments de sociabilité ayant peu de moyens financiers pour sortir ou accueillir des proches à la maison.

« L’isolement exacerbe les sentiments négatifs des personnes atteintes d’un handicap ou d’une maladie chronique. Tous les pans de leur quotidien sont touchés. Elles ont une mauvaise estime d’elles-mêmes, ce qui impacte leur vie professionnelle et le lien qu’elles entretiennent avec leur entourage. C’est un cercle vicieux à combattre », décrypte Axelle Davezac, directrice générale de la Fondation de France.

La « peur » d’être un poids entraîne le renoncement à la vie sociale

Certaines sont dans une attitude de renoncement : 48 % des personnes isolées en situation de handicap ou de maladie ont souvent le sentiment d’être « un poids pour leurs proches ». Du coup, 51 % limitent leurs relations pour cette raison.