L’accès aux soins des étrangers toujours difficile

L'accès aux soins des étrangers demeure difficile selon un rapport du Défenseur des droits
L'accès aux soins des étrangers demeure difficile selon un rapport du Défenseur des droits - crédit photo TAMIR KALIFA/The New York Times-REDUX-REA

Dans un rapport publié le 13 mai, le Défenseur des Droits s’inquiète des difficultés rencontrées par les étrangers pour se faire soigner en France tant leurs droits sont fragiles, quand ils ne sont pas « entravés par des pratiques illégales ».

Le nouveau rapport du Défenseur des Droits sur l’accès aux soins des étrangers en France fait état du même constat que celui paru trois ans auparavant : les étrangers éprouvent des difficultés à accéder aux soins sur le sol français. En cause : des préjugés tenaces. La France serait trop généreuse et son système de santé serait à l’origine d’un « appel d’air ».


Suspicion

Pourtant, les chiffres montrent une toute autre réalité. Sur 225 500 titre de séjours délivrés à l’issue d’une première demande en 2018, seuls 2% l’étaient pour raisons médicales. Moins de 1% des dossiers présentés aux médecins de l’Office français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII), en vue de l’obtention d’un titre de séjour pour soins, sont concernés par la fraude. « Et pourtant la suspicion persiste et rend plus difficile l’exercice des droits des personnes malades étrangères », peut-on lire dans le rapport.

Surtout M. Jacques Toubon déplore des difficultés d’accès aux soins qui s’accentuent. Le rapport souligne que la réforme de l’assurance maladie a conduit à une régression des droits de nombreux étrangers en situation régulière. Le contrôle de la régularité du séjour est plus restrictif, les étrangers récemment installés en France ne parviennent pas toujours à s’affilier… Le Défenseur des Droits pointe également une baisse « drastique » des avis médicaux favorables au maintien sur le territoire par l’OFII. En 2017, ils ont concerné un peu plus de la moitié des dossiers examinés, contre trois quarts auparavant. Par ailleurs, l’accès au séjour des personnes porteuses du VIH demeure préoccupant. « Comme l’a rappelé le ministère de la Santé dans un arrêté du 5 janvier 2017, les traitements antirétroviraux doivent être considérés comme inaccessibles dans tous les pays en développement », précise le Défenseur des Droits dans ce rapport.

Enfin, certaines préfectures semblent continuer à mener des contre-enquêtes pour opposer, sur la base de leur propre analyse de la situation médicale, des refus de séjour à des personnes faisant l’objet d’un avis favorable de l’OFII.

Santé publique

La situation n’est pas plus enviable pour les étrangers en situation irrégulière sur le sol français. Jacques Toubon déplore des refus de soins pour les personnes qui pourraient bénéficier de l’aide médicale d’Etat (AME). Le rapport fait le constat de « refus de soins directs » de prise en charge ou « indirects », avec des horaires limités de rendez-vous ou la demande de justificatifs administratifs supplémentaires. Pourtant, il rappelle son « enjeu majeur de santé publique », et met en garde contre le risque de réserver à certains un « accès résiduel » aux soins : la prise en charge tardive d’une personne non soignée « sera plus lourde qu’une prise en charge précoce », est rappelé dans le rapport.

Alexandra Luthereau