9,5 millions de femmes exclues du système de soins

Viva Magazine
© Viva Magazine

En France chaque année, 9,5 millions de femmes renoncent à se soigner faute de moyens, d’après le dernier rapport du Haut conseil à l’égalité (Hce) rendu vendredi 7 juillet à madame Schippa, secrétaire d’Etat en charge de l’égalité femmes-hommes.

Les femmes en situation de précarité renoncent aux soins et leur santé se dégrade, d’après le dernier rapport du Haut conseil pour l’égalité (Hce) rendu vendredi 7 juillet à madame Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat en charge de l’égalité femmes-hommes.

Le constat

Dans son dernier rapport, le Hce pointe une situation alarmante sur la santé des femmes en situation de pauvreté. 9,5 millions de femmes renoncent à se soigner en France, chaque année. D’après les auteurs, ce renoncement aux soins est dû principalement à leurs conditions de vie et de travail pénibles, stressantes et usantes, et insuffisamment reconnues. Pourtant, les femmes n’ont cumulé que très peu de points sur leur compte pénibilité mis en place il y a tout juste un an, alors que les hommes y ont plus facilement recours

D’après les chiffes, elles participent moins à la prévention et aux campagnes de dépistage, notamment des cancers du sein et du col de l’utérus. D’autre part, elles font les frais d’une médecine encore très androcentrisme (qui consiste à envisager le monde uniquement ou en majeure partie du point de vue des êtres humains de sexe masculin) explique le rapport. Les auteurs donnent l’exemple des maladies cardiovasculaires, première cause de mortalité des femmes, en particulier chez les plus précaires d’entre elles et qui sont encore considérées comme étant plus fréquente chez les hommes. Les femmes survivent moins que les hommes (43% des accidents cardiaques sont fatals chez les hommes et 55% chez les femmes), car elles sont prises en charge plus tardivement. « En effet, notent les auteurs, les symptômes spécifiques aux femmes sont mal connus par les professionnel.le.s de santé, les femmes elles-mêmes ou les éventuels témoins. Parmi les femmes, la mortalité est multipliée par 3 pour les catégories socio-professionnelles les plus défavorisées. »

Travail : augmentation des accidents et maladies chez lesfemmes

Depuis 15 ans, les maladies professionnelles, les accidents de travail et de trajet sont en forte augmentation chez les femmes, en particulier dans des secteurs à forte précarité, insiste le rapport. Dans les activités de santé, le nettoyage et le travail temporaire, les accidents du travail concernant des femmes ont ainsi augmenté de 81% entre 2001 et 2015, et les accidents de trajet de 43%. La mortalité prématurée liée à des maladies cérébro-cardiovasculaires chez les ouvrières est en moyenne trois fois supérieure à celle des cadres et professions intermédiaires. Ce qui s’explique notamment par des risques accrus liés à la précarité (tabac, alcool, surpoids).

Renoncement aux soins : les raisons

Pourquoi les femmes se retrouvent-elles hors des radars du système de soins français ? Coincée entre un travail précaire (quand elles en ont un) et les charges familiales (85 % des familles monoparentales ont a leur tête une femme), elles « ne peuvent se permettre de prendre le temps de consulter un(e) professionnel(le) de santé, le quotidien de ces femmes étant une course permanente, dans laquelle leur santé passe en dernier, après leurs enfants, leur compagnon et la gestion des difficultés financières », précise le rapport. Elles renoncent alors à solliciter les aides financières trop complexes : un tiers des potentiel.le.s bénéficiaires de la Cmu-C ne la demande pas ».

La plupart d’entre elles font aussi face  « à des dépassements d’honoraires ou à des délais d’attente trop importants, voire à des discriminations et des refus de soin », soulignent encore les auteurs.

Les préconisation du Haut conseil à l’égalité

Travail

Pour une meilleure prise en charge de ces femmes installées dans la précarité, le Hce recommande de modifier par décret les seuils de critères de pénibilité, notamment pour reconnaître dans le niveau élevé la manutention de charges peu importantes, mais répétées. Il souhaite aussi que les critères soient complétés pour inclure la station debout parmi les « postures pénibles », considérer les produits ménagers comme des « agents chimiques dangereux » et prendre en compte les horaires atypiques.

 
Simplifier les démarches

Le Hce demande une simplification de l’accès aux prestations sociales en matière de santé (fusion de la Cmu-C, de l’Ame et de l’Acs) et la mise en place d’un accompagnement pour faciliter les démarches, la formation des professionnel.le.s de santé à l’accueil des personnes en situation de précarité, au dépistage systématique des violences dans le cadre familial ou professionnel et aux symptômes spécifiques aux femmes pour certaines pathologies, cardiaques par exemple.
 
Et les auteurs de conclure : « La médecine a fait des progrès considérables ces dernières décennies, ils doivent bénéficier à tous, et à toutes ».

Les femmes et la pauvreté en France : quelques chiffres

Les femmes représentent 53 % des personnes pauvres, 57 % des bénéficiaires du Rsa, 82 % des emplois à temps-partiels, 62 % des emplois non qualifiés. 85 % des familles monoparentales ont a leur tête une femme et 1/3 de ces familles sont sous le seuil de pauvreté. Parmi les femmes ouvrières, les moins qualifiées, plus de la moitié n’ont pas de contraceptif.