Handicap : et si l’école devenait inclusive ?

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Face au décrochage scolaire, toujours aussi important, des écoliers handicapés, quatre associations lancent une campagne d’information pour rendre l’école plus accessible.

Des établissements toujours pas aux normes d’accessibilité, des enseignants peu ou mal formés, une stigmatisation importante des porteurs de handicap intellectuel… La scolarisation des élèves handicapés est aujourd’hui encore loin d’être évidente. Si à 6 ans, 85 % d’entre eux sont scolarisés dans une classe ordinaire, ils ne sont plus que la moitié à l’être encore à 10 ans. Pis, l’université ne compte qu’1 % d’étudiants handicapés.

Lancer le débat en classe

Pour remédier à cette situation, quatre acteurs majeurs du handicap en France, l’Apajh, l’Apf, le Ccah et l’Unapei ont lancé, mardi 23 janvier, une campagne d’information. A l’école élémentaire de la Porte-d’Ivry, en présence de Sophie Cluzel, secrétaire d’Etat chargée des personnes handicapées, leurs responsables ont présenté les outils mis au point pour soutenir les professeurs des classes de CM1 et CM2 décidés à sensibiliser leurs élèves.

Un numéro spécial du Quotidien – journal destiné aux enfants âgés de 10 à 13 ans – sur le handicap, a été adressé à 40 000 professeurs de CM2, afin d’apporter des supports pédagogiques pour lancer le débat en classe. Un site a parallèlement été créé. De quoi « contribuer à développer l’esprit citoyen de tous les enfants », a salué la secrétaire d’Etat, pour qui « sensibiliser les enfants, c’est aussi sensibiliser les familles ».

Et la sensibilisation, à l’école élémentaire de la Porte-d’Ivry, porte ses fruits. L’établissement, qui accueille 263 élèves, s’est lancée depuis une dizaine d’années dans l’inclusion des élèves handicapés. Elle en compte aujourd’hui 15, toutes classes confondues.

Mieux former les enseignants

Dans la classe de CM2 où se déroule l’atelier de sensibilisation, en présence de Sophie Cluzel, les élèves sont plusieurs à vouloir expliquer les avantages d’une école « pour tous » et apportent leurs propres définitions sur ce qu’est la différence, le handicap… Parmi eux, quatre sont porteurs de handicap : troubles de l’attention et du comportement, syndrome d’Asperger, autisme, déficience intellectuelle.

Une bonne cohésion que souligne Sophie Cluzel : « Futurs salariés, futurs chefs d’entreprise, vous aurez plus tard à vos côtés des collègues handicapés. Et vous serez déjà sensibilisés. Vous êtes la génération qui permettra qu’on puisse travailler ensemble. »

Mais la sensibilisation seule ne suffira pas. Outre la question de la différence de traitement selon le type de handicap, moteur ou menta,l[fn]Un élève porteur d’un handicap moteur a 8 chances sur 10 de faire sa scolarité dans un établissement ordinaire, contre seulement 3 chances sur 10 pour un élève porteur d’un handicap mental.[/fn], les associations pointent une formation insuffisante des enseignants, qui n’a été rendue obligatoire qu’à partir de 2013 et qui ne concerne pas les professeurs déjà en poste. « Accueillir des élèves handicapés, ce n’est pas une démarche facile. Il faut accompagner les enseignants, les former, explique Armelle Lenci, à la tête de l’école. J’ai été enseignante spécialisée, je suis maintenant directrice spécialisée et je peux conseiller mes équipes. Avec 25 élèves par classe, ce n’est pas toujours facile de gérer la situation. »

D’autant que les familles ne sont pas toujours prêtes à reconnaître le handicap de leur enfant et que des soins ne sont suivent pas forcément.

Une priorité pour le quinquennat

« Depuis la loi de 2005, la situation des enfants handicapés s’est améliorée, les portes de l’école se sont ouvertes, il faut maintenant briser le plafond de verre, souligne Sophie Cluzel. Il faut permettre leur qualification, leur entrée à l’université. »

Les pistes envisagées par le gouvernement pour pallier le décrochage scolaire sont nombreuses. Près de 11 000 postes d’accompagnants d’élèves en situation de handicap (Aesh) seront créés pour soutenir les enseignants. Avec un objectif : un taux et une durée de scolarisation identiques aux ceux des autres enfants. Vaste chantier. « L’accessibilité universelle pour tout type de handicap doit être possible dans toutes les écoles, martèle Sophie Cluzel. Toutes les écoles ne sont pas encore accessibles, mais doivent le devenir. C’est un engagement du gouvernement. » Pour l’heure, une enquête de l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement, publiée en 2015, révélait qu’un quart des écoles construites après 2008 ne respectent pas les normes.